Le troubadour de la Mort
Titre :
Le troubadour de la Mort.
Auteur : ryuji_takana@yahoo.fr
Chapitre : 07
Genre : Yaoï. Fantastique / Intrigue / Action.
Résumé : Londres, de nos jours. Les jours où Jack the Ripper (Jack
l’éventreur) sont révolus depuis longtemps. Le calme règne en ville. Pas de gros
crime pour la police. Mais la paix est de courte de durée. Le 21ième siècle
commence et l’atrocité avec. A peine plus d’un siècle nous sépare des meurtres
en série de Jack. Et pourtant, la ville se retrouve à nouveau plongé dans la
peur. Des crimes étranges sont produits. Chaque nuit, un corps est retrouvé. La
gorge tranchée, le sang vidé. On parle d’un nouveau Jack. Mais de l’éventreur,
on le nomme l’égorgeur. Ainsi depuis trois semaines, en titre du Times, nous
lisons : Nouveau meurtre de Jack the Bloodsucker.
Disclamer : Warning,
présence de scènes de violence, de meurtres et autres dans certains chapitres…
Pensées
Vingt-quatre Décembre
Vingt-quatre décembre : Quinze heures.
Antony trépignait d’impatience. Il était pire que certains enfants qui
saoulaient leur parent, ne tenant plus en place la veille de Noël. Il fallait
dire que ce dernier avait plein de projets en tête. Le premier étant de pouvoir
enfin ouvrir le frigidaire de Joshua. Bon, ce n’était pas vraiment une priorité,
mais ça le travaillait. Ce n’était pas sa faute, cet interdit était pire que
tout. Alors, il comptait jouer sur Noël et ses faveurs pour en obtenir une
justement. Bref, autant dire qu’il était ingérable, si bien qu’on l’envoyait à
droite à gauche pour faire diverses courses, afin de ne pas le supporter. Mais
voilà, à chacun de ses retours on entendait toujours les mêmes mots : « On est
le vingt-quatre décembre ! On est le vingt-quatre décembre ! ». Autant dire que
personne ne pouvait oublier quel jour on était…
D’ailleurs, Jon Bramfield, le patron du « Blue Moon », las de l’entendre décida
de l’envoyer plus loin encore. Il avait beau se sentir charitable, il n’était
absolument pas question de supporter CA ! Il fut donc envoyé à l’Est de Londres,
afin d’y chercher une commande pour un client. Cela n’enchantait pas
particulièrement le jeune homme, mais bon, au moins ça lui faisait passer le
temps, et ainsi, il évitait de regarder l’horloge toutes les deux minutes pour
voir si l’heure fatidique arrivait ou pas. Ainsi donc, conduisant pendant une
bonne demi heure, voir trois quart d’heure, passer le péage ayant prit un temps
fou, - c’est dingue de voir le monde qu’il peut y avoir sur cette route parfois
- Antony finit par arriver. Il se gara pour descendre de voiture. Se figeant
pour mieux observer, il trouva l’endroit fort peu habituel. Le décor désertique,
le manque de personne pour cette période et surtout ce silence désorientant, lui
donnèrent froid dans le dos. Mais pourquoi s’inquiéter ? Après tout, jamais Jon
ne l’aurait envoyé dans un lieu dangereux. Il avait beau être chiant ces
derniers temps, il ne l’était pas au point de se débarrasser de lui… Enfin
l’espérait-il tout du moins…
Avançant donc d’un pas calme, il porta ses mains à son visage, soufflant dedans,
peu réchauffé sur le coup. Faut dire qu’une simple écharpe de laine verte foncée
et un pull de la même couleur ne couvraient pas beaucoup… Ni le jean troué qu’il
portait d’ailleurs… Mais que voulez-vous, il paraîtrait que ça fait très jeune…
Du coup, pour rester à la mode, il avait froid, mais se laissait abattre tout de
même. Regardant à droite, puis à gauche, il chercha désespérément signe de vie.
Il se demanda d’ailleurs s’il ne s’était pas trompé d’adresse. Il vérifia son
morceau de papier pour s’en assurer avant de relever les yeux. Il ne s’était pas
trompé. Soupirant, il espéra que ce n’était pas une mauvaise blague du patron
pour le faire sortir, car il ne trouvait pas cela fort amusant. Cependant, dans
le doute, il inspira fortement pour finalement s’écrier.
- Youhou ! Y’a quelqu’un ? Je cherche un certain… Men… Mensé… »
- C’est Menset, pas Mensé, on prononce le « t ». » Rétorqua une voix juste
derrière Antony.
Ce dernier, surpris, fit volteface pour voir devant lui un homme masqué par une
écharpe, une paire de lunette de soleil - on se demande bien pourquoi d’ailleurs
il en portait - et un longue manteau noir. C’était vraiment… comment dire…
étrange. Oui, Antony ne trouvait pas cela normal. Mais bon, un client étant un
client, il n’avait pas vraiment mot à dire. Alors, selon les ordres de Jon, il
devait prendre un certain paquet et le ramené au club. Un cadeau un peu spécial
pour un membre du personnel… Le jeune homme se demanda bien qui sur le coup.
Secouant la tête en se souvenant de son impolitesse, il reprit son sourire, la
surprise passée, et ce, tout naturellement.
- Ah… euh oui ! Désolé, monsieur Menset. Enfin il parait que vous avez un colis
pour moi ? »
- Un colis ? Pas exactement… Enfin suivez-moi, il se trouve dans ce bâtiment
là-bas ! »
- Vous voulez dire ce truc délabré et abandonné là ? »
Antony pointa du doit un ancien bâtiment qui un jour avait dû servir
d’habitation. Mais une chose était sûre, c’est qu’à présent, on devrait payer
les gens pour y habiter. Autant dire que c’était suspect de devoir aller dans ce
bâtiment pour aller chercher un colis qui n’en était pas un. Plus le temps
passait, plus il soupçonnait Jon de lui faire une surprise. Ceci expliquant
cela… Pensant avoir découvert le poteau rose, il se tourna vers l’homme sans
pour autant lui laisser le temps de lui répondre.
- Et bien allons-y, il ne faudrait pas faire attendre mon Boss ! »
Et ce fut avec un pas tout guilleret que l’ancien garde du corps se mit en route
vers cette bâtisse qui semblait tenir encore debout grâce à l’opération du Saint
esprit. Il ne leur fallut évidemment pas beaucoup de temps pour arriver au lieu
voulu. Menset resta silencieux tout le long de la marche. Néanmoins, une fois
arrivée, Antony fut submergé par une grande déception. Il n’eut point de
serpentins, de SURPRISE ou autres choses auxquelles il s’attendait. Rien… Nada…
Au lieu de cela, il entendit un étrange rire, et tout fut noir… Evidement entre
les deux, un violent coup à la tête lui offrit de la douleur…
*****
Vingt-quatre décembre : Dix-sept heures, centre de Londres.
La fin d'après midi était sonnée par Big-Ben. Il eut autant de coups nécessaires
pour sonner dix-sept heures. Si bien que dans les rues, c'était l'agitation.
Tout le monde semblait pressé, comme si la fin du monde venait d'être annoncée
avec les tintements de l'horloge de renommée mondiale. On pouvait voir des
jeunes gens et des moins jeunes, courir à droite et à gauche avec les bras
chargés de paquets. Il avait aussi les voitures qui klaxonnaient dans un
brouhaha presque assourdissement. Cela ne semblait guère déranger les habitants
qui avançaient droits devant eux, dans cet univers à l'apparence chaotique.
Cependant, dans ce portait désordonné, une ombre semblait marcher à contre
courant. Elle était l'inverse des passants, semblant ainsi fuir le bruit, les
bousculades et la masse qui ne faisait que grandir toujours plus. Comme Joshua
détestait ce genre de choses. Cela lui troublait tous ses sens. Il en perdait
ses marques. C'était ça qui était gênant en fait, ce manque de repères. Mais ce
n'était pas comme s'il n'avait pas prévu cela. En fait, il savait
qu'aujourd'hui, ce serait la cohue. Si bien, qu'il avait prit sa canne blanche
pour non-voyant. Cette canne qu'il n'utilisait que deux jours dans l'année... Le
jour de l'an et la veille de noël. Même durant la fête nationale, il n'avait pas
besoin de cette dernière. Il y avait certes beaucoup de monde ce jour aussi,
mais lui, ne sortait pas. Sauf peut-être pour aller au club. Mais cela était une
autre histoire...
Avançant dans cette foule quasi oppressante, il se forçait réellement à
continuer dans cette rue. D'ailleurs, cela se voyait à ses agissements, ses
coups de cannes agacés, sa façon de chercher son orientation, et quelques autres
détails qu'un voyant ordinaire ne pouvaient voir. Tout le démontraient avec brio
que Joshua n'était vraiment pas à sa place et qu'il ne s'y plaisait pas. Mais il
y avait un problème... Il n'avait pas le choix de se trouver là. Pourquoi ?
Parce que c'était la veille de noël. Et qu'il ne lui restait donc plus que
quelques heures pour trouver le cadeau d'Antony. Non mais quelle idée avait-il
eu que de se laisser amouracher de ce châtain plus qu'agaçant. Lui qui s'était
juré de ne jamais se laisser tomber dans ce genre de sentiments, tant qu'il ne
l'aura pas tué. Mais son cœur en avait décidé autrement semble t'il. Si bien
qu'il se retrouvait en fin de soirée, un vingt-quatre décembre à dix-sept
heures, dans les rues de Londres, à la recherche d'un cadeau. Si un jour on lui
avait dit que cela se passerait comme cela, il l'aurait pris pour un fou et
aurait passé son chemin... Enfin dans sa malchance, il n’était pas seul. Un
certain dirigeant de club lui avait imposé un accompagnateur. Accompagnateur qui
tentait de suivre tant bien que mal, peu habitué à aller à l’inverse des autres…
Oxford Street était vraiment oppressante quand même. Mais elle était le lieu
idéal pour les achats. Si avec tous ces magasins, s’il ne trouvait pas LE cadeau
parfait pour Antony, il changeait de métier et se ferait volontiers castra. Bien
qu’au final, il resterait dans la musique. Parcourant ainsi la rue, il écoutait
avec intérêt la description que lui faisait son accompagnateur des vitrines. Il
avait dû pour l’occasion se munir d’un voyant. Là encore, il aurait préféré
éviter cela, mais le choix ne lui était pas donné. Avançant donc avec calme, il
soupira de lassitude. Franchement, dans tout ce qu’il entendait, il ne voyait
aucun intérêt à offrir telle ou telle chose à son « garde du corps ».
Honnêtement, pourquoi offrir un parfum à quelqu’un ? C’est plus insultant
qu’autre chose non ? N’est-ce pas un moyen de dire, « tu sens mauvais, alors je
t’offre de quoi sentir bon. » ? C’était ce que penserait tout du moins Joshua.
Et, il le prendrait vraiment très mal. Avançant donc sans vraiment s’intéresser
au dire de son accompagnateur, Samuel, il se plongea dans ses pensées, oubliant
de faire attention où il mettait les pieds, se demandant pourquoi on lui avait
imposé ce jeune homme là et pas un autre. La réponse à cette question lui revint
aussi brusquement que son tibia butta contre un plot de béton. Grommelant de
douleur, le chanteur laissa passer des injures qui firent même rougir le garçon
l’accompagnant.
- Ca va aller ? » Interrogea Samuel un peu hésitant.
- Oui ! Oui ! »
L’agacement était audible rien qu’à sa réponse, mais cela se comprenait.
L’aidant sans non plus trop l’aider, le jeune accompagnateur, qui savait trop
bien à qui il avait à faire, s’efforça de vérifier s’il n’y avait pas de grosses
blessures. Mais fort heureusement ce n’était pas le cas. Rassuré de cela, il
passa la main dans sa chevelure mitigée de mèches noires et rouge, histoire de
remettre en place sa longue tignasse qui avait la fâcheuse manie de tomber vers
l’avant. Il lâcha un soupire avant de se tourner vers une vitrine qui avait déjà
attiré son regard, se souvenant soudainement de sa question en suspend.
- Vous ne m’avez pas répondu, vous pensez qu’un bijou ou une montre plairait à
Antony ? »
- Un bijou ? Non mais franchement tu penses vraiment qu’il est homme à porter ce
genre d’accessoires ? »
- Bah pas forcément un bracelet ou un collier bien sûr, mais bon, une chaîne
avec un bijou peu banal, pourquoi pas ? Après tout, il aime bien ce qui est peu
commun. »
- Hm... »
Dans un sens, Samuel n’avait pas tord. Antony était du genre à avoir des
babioles farfelues qui avaient le don de le mettre en valeur. Comme ce bouquin
ancien qu’il aime montrer à qui veut le voir… Oui, il n’avait peut-être pas
tord. Mais il n’était pas question d’offrir un bijou commun. Non, il fallait
quelque chose de fin et distingué… Quelque chose qui pourrait paraître riche
mais discret en même temps. Joshua venait de trouver une piste. Reprenant donc
son calme, il se tourna vers son accompagnateur. Il restait à présent à trouver
LE présent qui conviendrait. Et pour cela, il lui fallait des yeux en bonne
santé, ce qu’il n’avait hélas pas…
- Bien ! Entrons ! Je veux que tu regardes bien à l’intérieur, que tu cherches
un objet qui soit discret et distingué à la fois, précieux, mais pas trop
voyant… Compris ? »
- Euh… ouai… enfin je verrais quoi ! »
Loin de voir ce que voulait vraiment Joshua, Samuel entra dans la boutique
suivit de prêt par son camarade imposé. Il ne se sentit pas vraiment à l’aise
sur le coup. En fait, tout ça n’était pas son truc… Mais alors vraiment pas son
truc. Si bien que lorsqu’un vendeur habillé de manière très hautaine vint à lui,
il remercia le ciel d’avoir un conseiller professionnel pour l’aider. Après une
longue discussion qui manqua de le perdre en chemin à plusieurs reprises, le
jeune homme finit par entendre ce qu’il désirait, une idée. D’ailleurs, il ne
fut pas le seul. Le chanteur lui aussi avait entendu. S’approchant de Samuel, il
se pencha et murmura à ce dernier son idée…
- Euh… Bah euh… je pendrais une de ces montres s’il vous plait… C’est possible ?
»
- Bien entendu Monsieur. »
Le vendeur qui avait des allures de majordome d’un autre temps trouvait ces deux
clients forts étranges. Mais n’étant pas là pour juger et étant surtout ravi
d’avoir une nouvelle vente, ce dernier ne se fit pas prier pour exaucer ses
clients. Si bien que devant les yeux de Samuel défilèrent une série de montres.
Il y avait toutes sortes de modèles. Des montres digitales, d’autres à
remontoir… Il y en avait même des très design et d’autres beaucoup moins… Mais
au final, après de longue discussion et descriptions, le choix s’arrêta sur une
magnifique montre à gousset. Oh, elle n’était pas cousu d’or avec des agréments
inutiles non, elle était simple et délicate, finement gravé avec du papier
d’argent on pouvait y découvrir un morceau de partition. Maintenue par une fine
chaîne en argent également, pour Joshua, elle représentait le cadeau idéal. Il
n’avait aucun doute à cela. Payant ce dernier, il se sentit le cœur étrangement
léger. Il l’avait enfin trouvé, et dans les temps… Il n’y croyait plus.
Satisfait et le démontrant, il invita Samuel à boire un chocolat chaud afin de
se remettre de cette quête…
*****
Vingt-quatre décembre : seize heures trente, sud de Londres.
Trois quarts d’heures étaient passés entre le coup reçu et l’éveil d’Antony. Ce
dernier, la tête lourde, eut du mal à ouvrir les yeux et à rassembler ses idées.
Que s’était-il passé ? Où était-il ? Il n’en avait pas la moindre idée ou plutôt
si, mais elle était vague et confuse. Gémissant pour tenter de se redresser, il
découvrit avec stupéfaction et horreur que ses mains étaient liés, qu’il était
déjà assit, sur une chaise et surtout, que sa peau était à l’air libre. Tout du
moins celle de son torse. Regardant autour de lui, s’habituant à l’obscurité, il
put remarquer qu’il était dans un vieil appartement délabré, une ancienne
chambre, si on se référait au motif de lapins délavés qui étaient restés en
vestige d’une ancienne vie. C’est alors qu’il réalisa la situation. Commençant à
s’agiter, il chercha à appeler. Mais, sa voix ricocha contre les murs,
augmentant cette impression d’isolation qui lui donna froid dans le dos.
Cependant, sa tête qui tambourina au bruit de sa voix, fut pire que jamais… Au
moins, il savait où il était… Il comprenait ce qui arrivait. Restait à savoir le
pourquoi ! C’est en essayant de le trouver, cessant de crier pour rien, qu’il
entendit cette voix… La voix de ce Menset… Oui, il en était certain. Grognant,
il s’agita de nouveau alors que la voix canalisait son regard.
- On se réveille enfin ? »
Un rire s’éleva, résonnant alors avec horreur dans le vieil appartement vide,
alors que le propriétaire de la voix ajustait une paire de gants noirs. Un
frisson parcourut l’échine d’Antony. C’était certain, il ne rêvait pas. Il
s’agissait bien de ce type étrange. Le pourquoi continuait de résonner dans sa
tête. Pourquoi se retrouvait-il dans cette situation ? Pourquoi son cœur
s’affolait de la sorte rien qu’en entendant ce rire ? Pourquoi il avait ce
sentiment effrayant qui l’envahissait ? Tant de pourquoi, et pas de réponses.
Serrant les poings afin de se libérer, se blessant par la même occasion les
poignets avec le fer des menottes, il ne quitta pas des yeux son ravisseur. Que
lui voulait-il à la fin ? Il allait lui poser la question quand la réponse vint
d’elle-même à lui.
- Tu… Je te tutoie, ça ne te gène pas ? Enfin bref, tu dois bien te sentir perdu
n’est-ce ? Il faut dire qu’un manant comme toi doit se demander pourquoi il se
retrouve enlevé, n’ayant ni argent ou bien à échanger. Et bien la raison est
simple… Mais je ne vais pas te la dire maintenant… Avant j’ai quelques petites
choses à faire. »
- Quoi ? »
Antony se donnait l’impression d’être complètement décalé. Non, en fait ce
n’était pas lui qui était en décalage, mais ce type qui semblait sorti tout
droit d’un cauchemar. Depuis quand on dit manant de nos jours ? Et puis d’où il
le connaissait ? Comment savait-il que ses moyens étaient égaux à sa bourse
trouée ? C’était étrange… Mais au moins il était certain que ce n’était pas une
surprise de Jon… Jon… S’il se rendait compte que ce n’était pas un client qu’il
lui avait envoyé voir, peut-être qu’il viendrait l’aider ? Mais, comment il
pourrait se rendre compte de cela ? Tournant et retournant les choses dans sa
tête, il ne se rendit pas compte du mouvement de son ravisseur. En fait, ce fut
l’empoignement de ses cheveux et le fait que sa tête fut tirée par l’arrière qui
le fit réagir… Autant de douleur que de surprise…
- Quoi ? Quand on est poli, on dit comment ou pardon ! Mais certainement pas
quoi ! Peut-être devrais-je d’abord te donner une leçon éducative avant tout ?
Quoi que ? A quoi cela te servira dans l’autre monde ? Enfin bon, pour
t’expliquer plus à ton niveau : Toi souffrir, toi mourir, toi être cadeau
précieux à Getseth. Voilà, j’espère que tu comprends mieux maintenant. Enfin ça
c’est dans les grandes lignes. Après tout, il vaut mieux un peu de pratique que
de grands mots… »
- Hein ? »
Plus les minutes s’égrainaient, plus cette sensation d’être avec un décalé
mental se faisait ressentir… Ou était-ce la douleur due à l’arrachement de
certains de ses cheveux ? Il ne savait plus vraiment, mais une chose était
certaine, il fallait que Jon se rende compte de son erreur et qu’il vienne à sa
rescousse. Antony ne voyait plus que cela comme espoir. Non, parce qu’il ne
connaissait pas de Getseth… En plus c’était quoi ce nom à deux sous ? Et Joshua…
Bah Joshua était parti tôt dans l’après-midi et il ne savait pas où il était.
Alors lui non plus ne devait pas savoir où il se trouvait. Pourquoi il avait
l’impression que ça commençait à sentir le roussi ? Mais attendez… Si ça sent le
roussi… Et cette odeur venait de lui… S’agitant devant cette réalisation, il vit
les mèches de cheveux arrachées brûler devant lui… Ouf, ce n’était pas lui.
Soulagé sur le coup, il se permit de respirer un peu. Mais, la détente fut trop
rapide, car un son métallique cognant contre quelque chose de moins métallique
se fit entendre. C’était un bruit qu’il connaissait bien… trop bien… Fixant en
direction du bruit, il fut stupéfait de voir l’objet.
- Que… ? »
- Qu’est-ce que je fais avec ça ? Et bien je l’ai trouvé sur toi, alors je me
suis dit : Pourquoi pas ? Après tout, il est si rare que mes victimes m’offre
l’arme pour les torturer. Note le privilège que tu as… Je suis gentil, tu ne
trouves pas ? »
- Mais vous êtes complètement à la masse ma parole ! Il faut vous faire soigner
! Libérez-moi à présent. Les plaisanteries les plus courtes sont les meilleures.
»
- Plaisanteries ? Qui parle de plaisanterie ici ? Pas moi en tout cas. Je suis
plus que sérieux. Après tout, tu es mon précieux cadeau. Un cadeau que Getseth
n’oubliera jamais… Merci à toi d’exister. Soit en sûr, je suis certain que les
dieux te réserveront une place de choix là où tu iras ! »
Les dieux ? Cadeau ? Non mais ce type avait vraiment des cases en moins !
C’était un cauchemar cette histoire. Il n’y avait plus de doute à cela.
D’ailleurs, Antony allait répondre à ce cinglé, mais quelque chose l’en empêcha.
Ce quelque chose était de la douleur. De la douleur due à une lame de dix
centimètres qui pénétra dans sa chair afin de lui découper avec soin le torse et
faire découvrir avec horreur la couleur rouge de son sang. Le cauchemar était
devenu réalité et la douleur du fer forgé qui lui rappelait cet état de fait.
Devant la surprise de l’agression, il laissa passer un cri de douleur qui
résonna et ricocha contre les murs de la pièce. S’entendre donna encore plus
peur au châtain. S’entendre, entendre sa voix et comprendre son ressenti était
pire que la lame du cran d’arrêt au final… Bien pire… Et Menset semblait s’en
rendre compte si on s’en tenait à son sourire satisfait et un poil sadique qui
agrémentait son visage pâle. Bien entendu, il n’allait pas s’arrêter là. Il ne
faisait que commencer son jeu… Découvrir la chair de l’ancien garde du corps,
était juste un moyen de comprendre comment Getseth pouvait s’intéresser à un
humain comme lui. D’ailleurs, avec un air purement sadique et malicieux, il
lécha du bout de la langue la lame ensanglantée de l’arme. Son sourire
s’agrandit. Il venait de comprendre… Ce sang était une pure merveille. Un petit
nectar sucré glissant dans la gorge, laissant un arrière gout de fer fort
agréable. En résumé, ce sang était égal à de l’ambroisie pour certains dieux.
Reposant son regard sur sa victime, il se pencha pour aller susurrer à son
oreille.
- Tu dois être l’élixir qui fait tourner la tête à ce cher Getseth. Ton sang est
le nectar le plus divin que je n’ai jamais gouté. Et pourtant, crois moi, j’en
ai bu beaucoup… Un tout les sept jours, depuis presque quatre mille ans… Un peu
plus ou un peu moins… Je ne sais plus… Le temps passe, temps s’écoule. Si bien
que je ne sais jamais quel jour nous sommes… Ou quelle année… »
Anthony ne comprenait rien à rien. Alors qu’il cherchait à fuir le visage, les
mots qu’il entendait, n’avaient ni queue ni tête. Elixir… Sang… Quatre mille ans
d’existence… Nourriture toutes les semaines… Quel était ce délire ? Dans quoi
était-il tombé ? Qui était ce fou ? Et bon sang… Qui était ce Getseth ? Ce fou ?
Il ne serait pas trompé de type quand même ? Il n’était pas en train de souffrir
pour quelqu’un tout de même ? S’agitant comme jamais, cherchant à s’échapper
toujours et encore, il finit par tout bonnement cracher à la figure.
- Mais ça ne va pas dans ta tête toi ! Tu te rends compte de ce que tu dis ? Tu
t’amuses à me blesser, à me faire souffrir. Et toi l’air de rien, tu me parles
de sang, d’élixir, d’immortalité. Tu dois vraiment te faire soigner. »
- Me faire soigner, mais pour quoi ? Ne me dit pas que Getseth ne t’a jamais
mordu… Enfin plutôt saigné puisque contrairement à la légende, nous ne mordons
pas. »
- Vous ne mordez pas ? Hein ? »
Du coup, Anthony en oubliait la douleur. Mais que racontait ce type ? C’était
bizarre mais il semblait si réaliste dans ses propos, qu’il avait l’impression
de presque le croire. Finalement la douleur avait du aussi atteindre son esprit
car il semblait vraiment croire ce qu’il disait.
Menset se mit à rire comme jamais et tapota la tête de sa victime.
- Ah mais oui… Suis-je bête… Getseth doit être du chinois pour toi. Vois-tu,
aujourd’hui, Getseth se fait appeler… Oh… tu n’as donc pas une petite idée ? Une
légère petite idée… Allez fais un effort. Qui côtoies-tu régulièrement depuis
pratiquement un mois ? Qui partage ton lit chaque soir ? Qui t’interdit un
certain accès dans une certaine cuisine ? »
- Quoi ? Comment connaissez-vous cela ? Qui êtes-vous ? »
L’otage venait d’entendre un point que seul lui et un certain chateur borné
connaissait, ce jeu du chat et de la souris pour connaître le secret du mystère
du frigidaire. C’était illogique…
- Comment ? La raison est simple… Je ne l’ai jamais vraiment quitté des yeux, ou
plutôt lui ne m’a jamais vraiment quitté des yeux. Que veux-tu… Les premiers
amours ne s’oublient pas. »
Les mots furent à peine prononcés qu’une lame pénétra doucement dans l’abdomen
d’Anthony, agissant ainsi comme un traitre et surprenant ainsi sa victime, avec
un délice non feint. Sans se soucier des cris que laissaient échapper le
châtain, il continua son explication, comme si de rien n’était, retirant le
couteau pour mieux le replanter dans le bras gauche.
- Alors vois-tu ? A l’époque où les pharaons étaient maîtres, un vieux prêtre
qui s’amusait à mélanger divers champignons afin de découvrir des remèdes
miracles pour augmenter beauté et richesse, créa une nouvelle espèce dont les
spores avaient la particularité de changer un homme en immortel. Cette invention
fut mise de côté, considéré comme bien trop dangereuse et contre les dieux. Mais
voilà, un jour, alors que j’allais dans le temple de la déesse Maât, mon pied
déclencha un vieux système qui ouvrit à moi une jarre contenant le champignon.
Je changeai et bien évidemment je ne voulais pas être le seul. J’invitai donc
mon ami, scribe à l’époque, pour partager ma vie. Mais bon, il avait une
conscience, des désirs, un cœur… Ce qui le poussa à s’opposer à moi. Et
aujourd’hui, il essaie toujours de la faire. Encore… Et encore… Pourtant, en lui
retirant les yeux, je pensais lui enlever son acharnement. Mais cela n’a point
marché. » Dit-il avec une moue boudeuse, alors que pour la deuxième le couteau
se plantait dans le bras, retirant avec douleur un lambeau de chair. »
A peine conscient devant la douleur ressentie, Anthony avait du mal à saisir
tous les termes. Il ne comprenait pas pourquoi il lui avouait tout cela, et
encore moins, pourquoi il disait que Joshua était, selon la définition, un
vampire. Le jeune homme luttait, quelque chose en lui, se buttait à vouloir le
contredire. Il ne voulait pas lui donner satisfaction. Cependant, chaque coup de
lame qui traversait son corps, était une épreuve qu’il peinait à franchir. Il ne
comprenait pas cette histoire de rivalité, de chasse ou autre chose, mais il
était certain d’une chose… Il ne devait pas céder. Il savait qu’il était l’arme
utilisée pour mieux atteindre l’homme qu’il aimait.
- Donc pour le calmer un peu, j’ai décidé de lui offrir un cadeau de Noël un peu
spécial. J’espère que tu es honoré. » Dit-il en tapotant la joue du jeune homme
avant de s’écarter, laissant la lame rangée dans la cuisse de ce dernier. «
Alors si tu voulais bien mourir maintenant… Cela m’arrangerait. Il faut encore
passer tous ces embouteillages pour arriver au centre ville. Cela va me prendre
un temps fou pour te livrer… Enfin une partie de toi, du moins… »
Le temps continua de passer. Les minutes s’égrainaient alors que des cris
retentissaient. Anthony tint le plus longtemps possible mais simple humain, et
des blessures graves, il mourut quand Big Ben annonça dix neuf heures. Satisfait
de voir cela, Menset dut reconnaître qu’il ne s’attendait pas à le voire tenir
aussi longtemps. Il n’y avait pas de doute à cela… Getseth avait le don de
découvrir les perles rares. Mais son travail n’était pas encore terminé. Son
cadeau n’était pas enveloppé et il pressentait que la route allait être longue
avant la livraison. Mais tout d’abord, la première étape… Le cadeau.
Détachant son otage, Menset prit soin de ne point se tacher en accomplissant son
travail. Après tout, il serait dommage qu’il soit arrêté par un policier à cause
d’une tache malvenue. Lui qui avait réussi à leur échapper jusqu’à présent. Il
fixa un instant le corps et se mit à se gratter la tête. Mais quel morceau
allait-il envoyer ? La tête… C’était bien trop classique. Une main ? Mouais…
Trop commun… Et comment découvrirait-il son propriétaire ? Les parties intimes ?
Trop évident… Ah… Non… Il avait mieux. Quelque chose de simplet d’unique qui
avait réussi à saisir ce cher Getseth. Le cœur…
Léger sourire aux lèvres, il récupéra le cran d’arrêt, le plongea une nouvelle
fois dans le torse de sa victime et commença à trancher la chair pour mieux
découvrir la cage thoracique, le tout en évitant une massive effusion de sang.
Il arrivait à présent à la partie la plus délicate de l’affaire… La découpe de
la cage thoracique. Il regarda partout dans la pièce avant de secouer la tête.
Ce n’était pas dans une chambre d’enfant qu’il allait trouver son bonheur. Il
sortit donc de la pièce et se mit en quête de l’objet idéal dans le bâtiment. Ce
fut au second étage, et ce, au risque d’une chute mortelle, qu’il découvrit ce
qu’il cherchait… Une cisaille que les entrepreneurs utilisaient pour couper les
barres de fer qui constituaient l’armature des vieilles constructions.
Ajustant ses gants, il attrapa l’ustensile pour redescendre au bon étage. S’en
suivit alors, une découpe minutieuse destinée à extraire l’organe le plus
mystérieux du corps humain. La tache prit plus de temps qu’il n’y pensait,
puisqu’il ne voulait absolument pas être sali. Mais, il y arriva, posant le
précieux présent dans la boite qu’il avait prédestinée à cela. Il laissa le
corps là où il était, n’étant plus son affaire, pour simplement rejoindre son
véhicule. Il fut simplement arrêté dans sa marche par un coup de fil auquel il
ne répondit pas, ne tenant pas à discuter pour le moment. Il prit très
rapidement la direction du centre ville, passant au bout d’un moment, le péage,
sans la moindre difficulté. Finalement, les embouteillages, il les avait
imaginés. La livraison ne fut guère compliquée. Un paquet avec un mot où il
était écrit « Ne pas m’ouvrir avant minuit. Anthony. » Il avait évidemment pris
soin de mettre la carte d’identité du jeune homme dans l’enveloppe, en dessous
du cœur, ainsi qu’une lettre rédigée par lui-même, afin que Getseth sache
parfaitement qui était là et de qui venait le cadeau. Il repartit le sourire aux
lèvres, sans s’éloigner bien loin, tenant particulièrement à voir la réaction de
son ancien amant.
*****
Vingt-quatre décembre : fin de soirée.
Joshua, le cadeau en main, était retourné au club afin d’effectuer son tour de
chant comme le stipulait son contrat. Il apprit là-bas qu’Anthony ne rentrerait
pas avant un certain temps, ayant eut une mission relativement longue, ce
dernier s’étant montrer insupportable toute la journée. Le travail achevé, les
groupies assumées, et le traditionnel verre de Noël avec le patron, il put enfin
retourner chez lui. Avant de partir, il vérifia qu’il avait bien le présent de
son amant. Comme, il était satisfait de pouvoir plier cette maudite canne
blanche, pouvant se mouvoir sans son aide. Au moins, il était en lieu connu, et,
croyez le ou pas, cela lui faisait du bien. Il prit son temps, sachant
parfaitement qu’il serait seul à la maison. Mais tout chemin ayant une fin, il
finit par arriver à destination. C’est là qu’il découvrit le précieux présent.
Loin de se rendre compte de ce qu’il y avait dedans, Menset ayant pris soin de
maquer l’odeur de sang, il prit le paquet dans les mains et rentra avec. Il nota
que son compagnon avait appris le braille pour lui donner ses indications. Il
trouva cela fort amusant, comme le témoignait le sourire qui naquit sur ses
lèvres. Il ne devait pas oublier de le remercier pour cela. Il déposa le présent
sur la table basse et alla prendre un bain.
Le temps passa et Big Ben sonna une fois… Deux fois… Trois fois… Et enfin Minuit
résonna dans tout Londres Anthony n’était toujours pas là… Il était déçu.
Cependant, il restait toujours le cadeau. Respectant les consignes, Joshua se
dirigea vers ce dernier afin de l’ouvrir. Il défit le nœud vert qui entourait la
boite, retira le couvercle pour glisser sa main en son sein. Là… Le temps sembla
s’arrêter… Plus de minutes qui résonnaient dans la pièce, dut au tic tac de
l’horloge. Rien… Juste cette sensation horrible sous ses doigts… Une texture
qu’il connaissait bien pour l’avoir déjà touché à maintes reprises. Posé
habituellement, il fut pris d’un vent de panique et laissa tomber la boite.
C’est qu’il entendit la lettre. Elle eut un son si puissant alors qu’elle était
si légère, qu’il en sursauta. Prit entre le désir de vomir et la volonté de lire
cette lettre, il vida son estomac en même temps qu’il se baissa pour récupérer
le document.
Tremblant comme jamais, il ouvrit l’enveloppe et commença à lire cette lettre
qu’il pouvait comprendre à défaut de la carte d’identité. Chaque mot était une
lame pénétrant son cœur… Chaque ironie, une colère naissante… Chaque fin de
phrase, un couperet vil et malicieux… Plus son cœur était haine, plus sa volonté
de le détruire devenait une vitalité. Maugréant de colère, hurlant presque à la
mort, il se laissa tomber contre ce cœur inanimé.
Pendant ce temps là, au sud de Londres, un archéologue qui avait perdu sa route,
découvrit avec horreur un corps sans cœur étendu dans le vieux bâtiment.
A suivre …