Yochimu
Titre : Yochimu
Auteur : Myushi
Chapitre : 04
Genre : Yaoï. Fantastique / Intrigue / Action.
Couple : ???
Disclamer : Tous à moi
Les pièces se révèlent
Mugen
n’avait que faire de l’agitation qui régnait dans le château à l’annonce de
l’arrivée des étrangers dans leur monde. Il n’attendait que cela. L’arrivée de
ces cinq personnes pour commencer à mettre en route un plan qu’il avait imaginé
il y a fort longtemps déjà. Les moindres détails, les moindres faits avaient été
prévus. Il n’était pas question d’échouer. D’ailleurs cela n’avait même pas
effleuré l’esprit du sorcier qui ne connaissait au final pas ce mot. Pour lui
tout était parfait. L’annonce de cet écuyer avait embellie sa journée à un point
que personne ne pouvait se douter. Dans sa pièce réservée, loin de tous, où nul
n’avait accès. Même pas le roi. Ce dernier ayant essayé une seule fois. Mais la
peur qu’il connut lors de cette tentative le dissuada pour plusieurs vies à
venir. Ce qui arrangeait pas mal les choses pour notre homme, qui n’aimait guère
que le roi s’interpose dans ses affaires. Le démon des lieux commençait à
s’activer avec une certaine énergie impatiente, afin de découvrir le visage des
visiteurs. Il voulait les voir avant tous, le visage du futur roi élu mais
également des piliers. Car il savait parfaitement que si un piliers devenait
sien, le roi désigné par la légende serait perverti et donc, un peu sien. Son
but premier restait donc de trouver les piliers, les mener à lui, pour enfin
avoir le pouvoir par l’intermédiaire de l’élu.
Il avait tout prévu. Rien laissé au hasard. Alors qu’il préparait les
ingrédients qui lui permettraient de voir en direct les inconnus, il révisait
son scénario, afin de ne rien oublier. Il y avait bien une chose que Mugen
détestait plus que tout, c’était bien l’erreur. Qu’elle soit de lui ou d’un
subornée, il avait du à l’accepter. D’ailleurs, malheur à celui qui venait lui
annoncer un échec. La mort étant le châtiment favori du mage sombre. Terminant
sans mal le sort qui lui permettrait de jouer les voyeurs, l’homme se mit en
place afin d’observer à loisir les petites brebis qu’il comptait bien mener à
l’abattoir. Cela consista à s’installer dans un siège de bois, renforcé avec du
tissu de velours noir, gravé de ruines anciennes, langage perdu depuis la nuit
des temps, mais pourtant connu du sorcier. Une fois bien installé, sa voix
s’éleva, assez rauque, froide, mais en même temps hypnotique, et une incantation
fut prononcée, offrande à l’obscurité.
- Oronar telemmaitë elrohir anwamanë. Lamalas cúthalion aerandir narmolanya
lenwë súrion rúmil linwëlin ! »
Les mots furent à peine formulés que, devant le mage sombre, un miroir sans
consistance apparu. En son sein, on pouvait voir apparaître des silhouettes qui
au premier abord étaient floues, mais qui se consolidèrent et devinrent net
assez rapidement. Satisfait de ce qu’il voyait, Mugen d’un geste de la main, se
focalisa sur une scène, un couple, deux jeunes accompagnés d’une chimère. Ces
derniers avançaient avec rapidité, bien que un suppliait l’autre de ralentir un
peu, ses pieds le faisant souffrir plus que de raison. Satisfait le sorcier
laissa un sourire se figer sur son visage pourtant glacial. Ses prunelles noires
s’illuminèrent d’un rouge peu engageant alors qu’un autre zoom provoqué par un
geste de la main s’effectuait.
- Voici donc le pilier de la protection et de la force. Intéressant. Amusant… Il
a déjà trouvé son symbole. »
Souriant toujours de façon étrange l’homme passa à une autre scène,
s’intéressant à une paire d’oreille, une queue, mais également à un bébé dragon
qui ne quittait pas un certain jeune homme…
*****
L’agitation dans le nord se faisait de plus en plus en plus pesante. L’ordre
avait été donné. Trouver les étrangers et les emmener au Roi. Mort ou vif. Plus
mort que Vif d’ailleurs. Ce qui n’arrangeait pas les Iden. Le groupe de rebelles
en place, destiné depuis plusieurs générations à guider les élus. Mais cela
inquiétait aussi Stephen qui guettait avec le regard d’un père l’entrée du petit
village où il était. Aerandir n’était pourtant pas un lieu vraiment agité.
Cependant, depuis cet ordre royal, tout devenait extrêmement compliqué. Et Davis
qui n’arrivait toujours pas. Ce qui inquiétait de plus en plus l’homme.
Qu’était-il arrivé à son ami ? Où était-il ? Etait-il devenu prisonnier des
ennemis ? Toutes ces questions tournaient dans la tête du brun, sans pour autant
obtenir de réponses. N’aimant pas cette sensation, le chef des rebelles
faisaient des allers retours entre la sortie du village et un banc non loin,
hésitant entre partir à la recherche de son bras droit, ou attendre patiemment
que ce dernier arrive. Qui sait, Davis pouvait simplement être retardé. Stephen
ne savait vraiment pas.
La scène dura ainsi presque deux heures. L’homme faisait des allers venus entre
les deux points. Il fixait l’horizon avec angoisse. Cela aurait pu perdurer de
longs moments encore, si le regard de Stephen n’avait pas été attiré par un
groupe armé qui arrivait dans sa direction. N’aimant guère cela, ce qui se
comprenait dans sa situation, le chef des Iden décida que le moment de quitter
le village était venu. Erreur ou pas, il n’avait pas vraiment le choix. Les
évènements bougeaient trop vite. Comme l’agitation, dans le coin, devenait trop
risquée. Il devait à tout prix trouver Davis avant que ce dernier ne tombe dans
le piège qui était entrain de se tisser. En espérant qu’il ne soit pas déjà trop
tard. Le brun était dans cet optique quand un cri derrière lui se fit entendre.
Surpris, sur le point de quitter les lieux, il se tourna sur lui-même afin de
voir ce qu’il se passait. Bien mal lui en avait pris. Car en l’espace de
quelques secondes tout bascula…
- Laissez-moi ! Je ne sais rien… Laissez-moi ! » Hurlait une voix féminine, tout
en tentant de repousser les mains qui tentaient de la saisir.
- Viens ici ma belle. Je suis certain que tu sais un tas de choses. Et que tu
vas te faire un plaisir de nous apprendre ! Pas vrai les gars ? » Demanda le
militaire à ses collègues, avec un sourire qui voulait tout dire.
- Ouais, ouais… un tas de choses ! » Fut leur réponse, tous avec un sourire
béat…
- Je ne sais… » Commença à rétorquer la jeune femme avant d’être subitement
coupée.
Elle vit le soldat qui la tenait, voler pour s’écraser un peu plus loin sur le
sol. Les autres soldats réagirent et foncèrent droit vers leur agresseur.
Agresseur qui se débarrassa de ses assaillants en moins de temps qu’il en
fallait pour dire « ouf ». Epée au poing, il semblait être un autre homme. Son
sourire qui restait figé en temps normal sur son visage, avait disparu pour
laisser place à une froideur qui glaçait le sang. Loin d’être découragé par la
mimique de Stephen, le premier soldat qui avait été mis à terre, le plus gradé
semble t’il, se redressa et fixa le chef rebelle avec un sourire acidulé mais
également pervers.
- Alors comme ça on veut jouer les chevaliers servants ? Tu sais ce qu’on fait
aux chevaliers ? »
- Ouais, tu sais ? » Firent en cœur les hommes de ce dernier qui s’était
redressés à leur tour et avait encercler Stephen.
- Rien de bien effrayant si je me fis à ce que je vois. » Informa toujours aussi
froidement le brun.
- Vas-y, moques-toi pendant que tu peux encore. Après tu supplieras qu’on te
laisse la vie sauve. » Fit avec sarcasme le supérieur des soldats.
- Hm… Et bien montrez-moi ça ! »
L’Iden eut à peine fini sa phrase qu’il se retrouva attaqué, en traître, par un
homme derrière lui. Loin d’être idiot, l’ayant vu venir, cela était tellement
digne de l’armée royale, Stephen esquiva le coup en faisant un pas sur le côté,
causant – malencontreusement ? – un carambolage entre deux ennemis. Un blessé et
l’autre sonné, il ne restait plus que deux adversaires à notre rebelle. Bien
décidé à terminer au plus vite avec ces derniers, ne tenant pas à ce que les
renforts qu’il avait vu à l’entrée du village, n’arrivent, il se mit en
position. Au bout de quelques mouvements épéistes, la victoire était faite.
- Rentrez donc au palais, et laissez les habitants de Aerandir en paix. »
Avertit Stephen, tout en rangeant son épée d’un geste simple.
Soupirant, l’homme se tourna vers la jeune femme qui n’avait pas bougée.
S’approchant de cette dernière, il la vit reculer d’un pas, assez farouchement.
Ce qu’il comprenait parfaitement. D’ailleurs, à ce moment précis, le sourire
revint sur le visage du brun, en même temps qu’il s’adressait à cette dernière.
- Ne vous inquiétez pas, je ne vous ferais pas de mal. » La rassura t’il en
souriant.
- Qui… Qui êtes-vous ? » Demanda la jeune femme qui se demandait si elle n’était
pas dans un rêve éveillé.
- Personne ! Disons un ami ! Allez partez ! »
Il accompagna le geste à la parole avant de la fixer. Il la vit enfin bouger et
courir en direction de la sortie Nord du village. Stephen songea que l’idée
était bonne. Enfin elle l’aurait été si un groupe de soldat n’arrivait pas par
ce côté. Ce qui aurait pu être une simple sortie discrète de Aerandir se révéla
être un vrai casse pipe, où bien malgré lui, Stephen était entraîné. Ne tenant
pas plus que cela à jouer encore une fois de l’épée. Profitant que certains
hommes soient dans l’inconscience, le brun opta pour faire un petit détour.
Sortir par le sud pour rejoindre le Nord. A ce rythme, il n’avait qu’à envoyer
l’armée Royale au point de rendez-vous avec Davis et livrer ce dernier. Motiver
par cette pensée, et ne tenant pas à perdre son ami et bras droit, le chef des
Iden se mit en mouvement assez rapidement, quittant enfin le village, pour se
diriger vers le Sud… Loin de se douter de se qui se préparait dans l’ombre…
*****
Le voyage semblait s’éterniser. Ce qui n’aurait pas été finalement un drame, si
le silence avait été accompagnateur. Mais c’était loin d’être le cas. Et au lieu
d’avoir droit à un silence mérité, il avait droit aux commentaires sans fin
d’une pile électrique qui avait été humaine avant de franchir le pas de la porte
des mondes. Dépité, mais surtout inquiet, le nomade laissait un monologue
s’installer. Il n’y avait plus d’eau. Le temps ne semblait pas opportun. Le
châtain voyait au loin le sable virevolter et s’agiter. Pas de doutes à avoir,
une tempête de sables allait avoir lieu. Tout cela accumulé amenait Davis à une
seule question : « Allait-il survivre à cette journée ? ». Et pour le moment, la
seule réponse qui s’imposait à lui était un non un peu hésitant. Soupirant
devant cet état de fait, pas vraiment fou, ni suicidaire, il arrêta sa monture
pour en descendre. Il fixa alors le pilier trop fatiguant pour être vrai – même
s’il l’était pour son grand malheur – et lui tendit la main, avec un air plus
que sérieux. Il fallait dire que la situation était grave.
- Descends ! Nous devons nous mettre à l’abri ! » Informa le rebelle un poils
agacé.
- Hein ? Mais pourquoi ? Je suis bien là. En plus c’est marrant de voyager sur
un chameau. Et puis tu ne m’as pas écouté. Tu sais ce que je t’ai demandé ?
Alors ?? Tu… » S’agita Shawn, le visage toujours aussi souriant avant d’être
subitement coupé.
- Silence à présent ! » Demanda le châtain en se massant les tempes. « Et obéis
! »
La voix dut rappeler, à Shawn, un certain brun glaçon car il se tut
immédiatement et descendit du chameau sans la moindre protestation. Perplexe,
Davis fixa le roux en se demandant bien par quel miracle il était arrivé à cette
réaction. Cependant, il ne préféra rien dire et se mit en marche, guidant
l’animal vers un lieu qu’il espérait être un abri. Il savait qu’il devait faire
vite. Tout seul, cette tempête de sable n’aurait pas été un problème, mais avec
un compagnon de voyage tel que Shawn, ça se révélait très vite être une épreuve
de force. Et dire qu’il était avec le pilier de la nature. Ce n’était vraiment
pas gagné…
- Dis ? Pourquoi tu es si inquiet ? C’est parce qu’il y a le sable qui vole ? Il
ne faut pas se faire de soucis tu sais. Tu as dit que j’étais le pilier de la
nature alors la nature ne devrait pas me faire mal. Non ? » Demanda quelque peu
timidement, pour la première fois, le jeune homme.
- Hm… J’ai dit silence. Et tant que tu n’as pas ton symbole, pilier de la nature
ou pas, tu n’es pas protégé. Alors suis-moi et surtout ne t’éloignes pas !! »
Expliqua un peu plus sèchement qu’il ne l’aurait voulu l’Iden qui franchement
s’inquiétait de la suite des évènements.
- Mais… »
Shawn cessa ses protestations quand son regard vert croisa celui de son guide.
Il savait que lorsqu’il avait à faire à ce genre de regard, tout cela était
sérieux. Soupirant, boudant presque, il suivit donc son vis-à-vis, se demandant
bien où il les amenait comme ça. En plus, il marchait en direction de la tempête
de sables. Le roux manqua de le signaler avant de se souvenir du regard, il se
contenta donc de regarder droit devant lui, pour enfin voir la raison de cette
destination. Il y avait une sorte d’amas de pierres, comme une grotte jaillit de
nulle part, mais sans être une grotte. C’était vraiment intriguant. Mais ayant
compris que pour le moment sa langue il devait la garder dans sa poche, il
décida de garder ses questions pour lui et donc être silencieux. Silence
qu’apprécia à son juste mérite Davis qui de son côté se demandait bien ce qui
avait pu avoir un tel effet sur son compagnon non voulu. Enfin, il n’allait pas
se plaindre non plus. Il profitait de cette accalmie pour atteindre au plus vite
ce vestige du passé. Pour une fois que cette chose pouvait se rendre utile, il
n’allait pas s’en plaindre.
Silencieux, alors que la tempête se dirigeait vers eux, les deux hommes et le
chameau bravaient le vent avec la volonté d’arriver très vite à ces ruines. Et
ce, sans penser à la soif qui s’instaurait. Et cela autant pour Davis que pour
Shawn. Ce dernier restant étrangement calme et silencieux… Troublé, Davis se
tourna sur lui-même, afin de voir si le pilier le suivait toujours pour soudain
s’apercevoir…
*****
Alexandre suivait toujours son frère qui s’entêtait à rester muet devant ses
questions. Choses qui agaçaient quelque peu le cadet. Pourquoi il agissait ainsi
? Après une petite réflexion, le brun se souvint que Vincent avait toujours agi
de la sorte. C’était sa nature. Comme sa nature était agaçante parfois. Alex
avait besoin de ses réponses. C’était sa façon d’être. Il voulait comprendre. Ce
qui était normal pour un esprit scientifique comme le sien. Mais cela Vincent ne
le voyait pas. Il continuait d’avancer avec cette étrange bestiole sur l’épaule
qui semblait être aux anges avec lui. Non mais franchement, un animal heureux
d’être avec lui, c’était irréel. Dans quel monde ils étaient tombés ? C’était
une question que se posaient l’aîné mais également le cadet. Une question qui
pour le moment n’obtenait que des réponses aussi farfelues les unes que les
autres. Et la présence de la chimère n’aidait vraiment pas à avoir des idées
logiques.
Cependant, ce n’était pas l’animal qui inquiétait plus Vincent. Mais plutôt la
situation des autres. Etaient-ils eux aussi tombés, aspirés dans un autre monde
? Cela ne faisait aucun doute. Vincent se souvenait parfaitement d’avoir vu
d’abord Shawn se faire absorber, suivit de Gabriel et Andrew. Ensuite lui et
Alexandre puisqu’il le suivait. Donc tout le monde avait passé cette étrange
porte. Mais avaient-ils rejoint ce monde ? Où sont-ils tombés dans d’autres
mondes ? Vincent espérait que tout le monde était ici. Ne serait-ce pour Gabriel
qui ne pourrait pas gérer Andrew et Shawn. Si tant est qu’il soit avec les deux.
Là encore, Vincent se faisait du soucis. Il ne savait pas comment avaient évolué
ses amis. Ils avaient sûrement mûris. Mais en voyant l’attitude de Shawn, il
avait quelques doutes. Même si Andrew s’était montré plus posé, il n’avait pas
hésité à entrer dans le jeu de Shawn. A cette pensée, Vincent augmenta la
cadence de ses pas. Il devait vite les trouver. Et son instinct lui disait qu’au
nord, cela pourrait se réaliser. Il ne savait pas pourquoi, mais c’était ainsi !
Plongé dans ses pensées, Alexandre qui suivait tant bien que mal, grognant en
voyant que son frère l’ignorait complètement. Il avait cessé de poser des
questions. Cela ne servirait à rien, si ce n’était lui donner encore plus soif.
Il se contentait donc de suivre, en bougonnant, mais aussi en observant l’animal
qui semblait vraiment s’être attaché à son frère. Soupirant, il nota qu’il
voudrait bien l’étudier. Voir comment il devient une arme. Mais voilà, la
griffure sur son visage lui rappela qu’il ne valait mieux pas, pour le moment
tout du moins. Alexandre était entrain de vérifier sa griffure quand il se cogna
au dos de son frère. Se massant le nez douloureusement, il fixa son aîné qui
s’était figé sans prévenir, fixant le ciel avec insistance…
- Eh… Vince ! Tu pourrais prévenir quand tu t’arrêtes ! » Soupira le cadet qui
fixait toujours son frère. « Vince ? Qu’est-ce qu’il y a ? »
- Hm… » Fit le brun observant toujours le ciel. « Rien… Une impression d’être
observé ! Continuons ! Nous devons retrouver les autres avant qu’il ne soit trop
tard ! »
- Observé ? Comment ça ? » Demanda Alexandre qui ne comprenait vraiment pas. «
Vince ! Réponds-moi ! Observé par qui ? Moi je ne sens rien ! »
- Sans importance ! En route ! » Coupa l’interpellé avant de se remettre en
marche.
- Mais… Vince ! » S’exclama le scientifique avant de courir pour rejoindre son
aîné qui déjà avait pris de l’avance. « Franchement, tu pourrais un peu me
répondre… »
Se contentant de le fixer un instant, Vincent ne répliqua pas à la dernière
remarque de son frère. Il savait que ce dernier avait pas mal de questions qui
tournaient dans sa tête. Mais ce n’était pas le moment de les poser. Bien
entendu, il le comprenait. Mais s’il commençait à céder à ses caprices, jamais
ils n’atteindraient la destination qu’ils étaient censés atteindre. Et cela
n’était pas possible. Il devait retrouver les trois autres. Seuls, ils étaient
condamnés… C’était l’idée première de Vincent. Une idée tenace qui ne voulait
pas le lâcher. Son pas le démontrait, alors qu’il accélérait, semant peu à peu
le cadet qui à bout de force, pas vraiment du genre physique, commençait à
fatiguer.
- Vince… » S’arrêta t-il au bout d’un moment, alors que son frère s’éloignait de
plus en plus de lui. « Je n’en peux plus. Faisons une pause… »
L’aîné n’entendit pas son petit frère. Il fallut l’agitation de la chimère pour
le faire s’arrêter. Et là encore, il ne vit pas tout de suite que son frère
n’était plus derrière lui. Ce fut encore l’agitation de la chimère qui le lui
fit remarquer. D’abord surpris, il regarda autour de lui.
- Alexandre ? » L’appela t’il. « Montres-toi ! Alexandre ! »
Mais il n’eut aucunes réponses. Juste un long silence coupé par un étrange
miaulement. Miaulement qui avait cessé d’ailleurs, l’animal étant occupé à tirer
son maître. L’obligeant ainsi à retourner sur ses pas. Si Vincent au début lutta
contre cela, cherchant son frère vraiment inquiet, il dut se résigner devant
l’insistance de la chimère. Grognant au possible, songeant que ce n’était
vraiment pas le moment de suivre les caprices de cette chose, il marcha en
regardant autour de lui, dans l’espoir de voir son frère. Ce qui fut le cas au
bout d’un moment. Il était à terre, assis, jetant des morceaux d’herbe, pas
vraiment content. Soulagé, le brun se dirigea vers ce dernier. Toujours dans son
attitude froide, il se mit à son niveau, une fois arrivé à lui.
- Eh ! Préviens la prochaine fois que tu t’arrêtes ! » Grogna l’aîné en lui
appuyant sur le front. « Je me suis fait un sang d’encre pour toi ! »
- Je l’ai fait ! » Grommela Alexandre en retirant sèchement le doigt de son
front. « Mais monsieur ne m’écoutait pas ! Monsieur avançait sans faire
attention ! »
- Hm… » Fut la réponse du brun qui se redressa en même temps. « Excuses-moi !
Mais je m’inquiète pour les autres ! Nous devons vite les retrouver ! »
- Je le sais très bien ça ! » Le scientifique croisa les bras en tournant le dos
à son frère. « Mais je ne suis pas une machine sans sentiments moi ! J’ai besoin
aussi de repos ! »
- Alex… » Soupira Vincent avant de grogner. « Cesses tes caprices ! Je comprends
ce que tu ressens. Mais crois-tu que si tu avais été seul tu pourrais te
permettre ce genre d’attitude ? Nous ne sommes pas en simple ballade ! »
- Mais… Je… » Réalisant d’un coup la véritable inquiétude de son frère, le jeune
homme se redressa et le fixa. « Désolé… »
- Hm… Pas grave ! » Le rassura à sa façon Vincent, glissant sa main dans ses
cheveux. « Allons-y ! Je marcherai plus lentement… »
Alexandre fixa son frère, et souriant à nouveau, il se remit en marche. Pas
besoin de mots, ou de réponses. C’était comme cela entre eux. Il le connaissait
à force. Et surtout il réalisait son égoïsme. Il est vrai que si Vince n’avait
pas été là, il se serait fait massacrer par ce groupe. Alors, il ne devait plus
penser à sa fatigue. Même si c’était dur, il devait avancer. Car il savait
qu’une fois tout le monde retrouvé il pourrait enfin se reposer. Il ne savait
pas quand. Ni si cela arriverait un jour. Mais avec son frère à ses côtés, il se
savait capable d’y arriver. Après tout, Vincent devait être aussi fatigué. Il
s’était quand même battu. Et il avait rebroussé chemin pour lui… Alexandre
réalisait à quel point son frère était courageux…
- Merci… » Fut la seule réponse de Alex absorbée par le vent, tellement ce mot
fut murmure.
*****
Gabriel continuait d’avancer dans cette jungle ambiante, filant toujours vers le
nord, se demandant bien ce qui allait se passer encore. Il n’aimait pas cette
situation. Il se sentait quelque peu mal à l’aise. Un « je ne sais quoi »
l’empêchait de bien se concentrer. Et il n’appréciait vraiment pas cela. Sans
oublier son compagnon et ami qui était vraiment à la masse. C’était à se
demander si ce dernier n’avait pas oublié de grandir. Pourtant ses romans
étaient tous assez mature. Etrange mais mature. Gabriel pouvait l’affirmer,
ayant pour simple métier, vendeur dans une librairie. Enfin le sujet n’était pas
là. Il ne devait pas penser à ça et continuer d’avancer, tout en surveillant le
fait que Andrew le suivait toujours. Il manquerait plus qu’il le perde. Bien que
cela semblait fortement improbable. Depuis qu’il avait ces fichues oreilles et
cette queue, il sentait et ressentait des choses que jamais avant cela il
n’avait senti. Ca ne lui plaisait pas plus que ça, mais en ce moment précis ça
l’arrangeait. Ce qui était parfait. Quoi que… Ca restait tout de même à prouver.
Andrew, de son côté, essayait de suivre tant bien que mal. Gabriel avançait avec
une agilité déconcertante. Il avait du mal à se faire à tout cela. Enfin pas
qu’il avait du mal à concevoir ce qu’il voyait, il était écrivain tout de même,
mais la fiction rejoignant la réalité était beaucoup en une fois. Bien sûr, il
avait ri en voyant les oreilles apparaître, ainsi que la queue. Mais que
pouvait-il faire d’autre sur le moment. Andrew n’était pas quelqu’un de sérieux
en apparence. Il n’aimait pas se montrer froid ou grognon. En fait, il aimait
partager son sourire et sa bonne humeur. Et pour cela, il faisait le clown. Même
quand cela agaçait, il continuait. Il trouvait qu’il valait mieux rire de la
noirceur que de s’enfermer en son sein. Cependant, le dos tourné aux autres, la
solitude présente, le jeune homme montrait un autre visage. Mais nul ne le
connaissait. Et Andrew comptait bien le cacher à jamais. Mais, pour le moment,
il n’y arrivait pas. En fait, il commençait à s’inquiéter. Trouver un dragon,
c’était amusant. En plus si peu commun que ça pouvait passer. Mais que le corps
d’un ami change subitement, ça…
Bon, d’accord, sa réaction première n’était pas la bonne. Une crise de fou rire
pour finir par une réflexion complètement idiote. Pourquoi il lui avait caché
ses oreilles et sa queue. Mais Andrew se voyait mal dire : « Gabriel, il se
passe quelque chose d’étrange ici. Cette voix qui m’appelle. Ce dragon. Et puis
maintenant ta transformation physique. Qu’est-ce qu’il se passe ? Où sommes-nous
? ». Non, il ne pouvait vraiment pas. Ce n’était pas sa nature. Soupirant à
cette pensée, il retrouva très vite le sourire, essayant toujours et encore à
suivre son ami qui avait vraiment l’agilité d’un chat sur le coup. Le fixant,
alors que lui-même avait manqué de tomber, il inclina la tête…
- Eh ! Attends-moi ! Je ne marche pas aussi facilement que toi moi ! Je ne suis
pas un chat ! »
- Je n’en suis pas un non plus ! » Grommela le blond alors qu’il revenait au
niveau de son ami. « Mais nous devons nous dépêcher, j’ai… »
- Un mauvais pressentiment… Le danger approche. Une force hostile ! » Coupa
Andrew en le fixant avec un sérieux peu commun. « C’est ce que tu allais dire
n’est-ce pas ? »
- Hm… Oui, en effet… Comment tu … ? » Demanda perplexe mais surtout inquiet le
vendeur.
- Car je connais ton sérieux voyons ! » Fit Andrew avec un sourire sans faille.
- Idiot ! » Grogna Gabriel qui s’était fait avoir comme un novice. « Continuons
! »
- Oui ! » Répondit avec dynamisme le brun, tout en mettant Ryu sur le somment de
sa tête.
A ces mots, ils se remirent en route. Cependant Andrew restait encore en
retrait, fixant son ami s’éloigner sans vraiment s’éloigner. Il lâcha un soupir
avant de sourire plus doucement…
- Je l’ai échappée belle cette fois-ci ! » Murmura t’il pour lui-même. « Un peu
plus et Gaby aurait compris. Je me demande quel est ce danger quand même. Et
surtout à qui appartient cette voix dans ma tête. J’ai l’impression que je
deviens fou… Enfin bon… Pas le moment de penser à ça. Nous devons vite sortir de
cette jungle. Tu es d’accord Ryu n’est-ce pas ? »
Un Piuuuuu plein d’entrain fut la réponse du bébé dragon qui restait sagement
sur la tête du jeune homme. Ce dernier se mit doucement à rire alors qu’il se
dépêchait, malgré sa fatigue, de rejoindre son ami. Il savait mieux que
quiconque, en cet instant précis, que les choses n’étaient pas très bonnes pour
eux. De plus, il se demandait comment ça se passait avec Shawn, Alexandre et
Vincent. Il était certain qu’arrivés à leur destination, Gabriel et lui, il
aurait leur réponse et bien d’autres encore. Il était d’ailleurs dans cette
pensée quand il se sentit poussé par derrière. Il roula avec douleur dans la
végétation assez haute avant de se cogner contre un arbre. Grognant de
souffrance, il regarda la cause de cette chute, tenant instinctivement Ryu dans
ses bras pour le protéger. Réalisant que c’était Gabriel, il gonfla les joues de
mécontentement.
- Mais ça ne va pas ! J’aurais pu… »
- Chut ! » Coupa le blond en le bâillonnant de la main. « Regarde, des hommes
armés… »
~ Hommes armés ? ~ Songea le brun.
Cette pensée fut-elle à peine terminée que des voix lui parvinrent. Des voix que
son ami pouvait également entendre, ce qui avait un quelque chose de rassurant,
sans vraiment l’être. Un signe de tête fit comprendre, d’ailleurs, à Gabriel
qu’il avait saisi. Soupirant, Andrew se tut et fixa en direction des voix,
écoutant, bien qu’agacé. C’est qu’il s’était fait drôlement mal ! Gabriel ne
s’en rendait pas compte !
- Chef, vous êtes certain qu’ils sont là ? » Demanda un des hommes à ce qui
semblait être son supérieur.
- Bien entendu bougre d’idiot ! Le mage Mugen nous l’a dit : « Allez dans la
jungle et trouvez deux des cinq étranger. Un aura déjà trouvé son pilier.
Cherchez l’animal et la nature sera à nous. ». C’est plus que clair ! Alors
cherchez les ! Et n’oubliez pas, les ordres sont de les ramener vivant ! »
Maugréa le chef du groupe.
- Il en a de bonnes ! » Murmura un des soldats. « C’est comme chercher un gnome
dans une grotte sans fond ! »
- Quoi ? Qu’as-tu dit ? » Hurla le lieutenant en place.
- Euh… Rien ! Enfin si… On cherche monsieur ! »
Sans plus attendre le soldat se mit à piquer la végétation afin de voir si
personne ne se cachait dedans, passant à deux centimètres de la queue de Gabriel
qui s’hérissa instinctivement… Andrew dut alors bâillonner son ami qui toutes
griffes sorties, dans les deux sens du terme, s’apprêtait à sauter à la gorge de
son agresseur. Le tenant fermement, Andrew observait les hommes puis son ami.
Ils avaient parlé de pilier comme la voix dans sa tête. Et de nature. Gabriel
était-il donc un pilier de la nature ? Le pilier de la nature dont l’homme lui
parlait ? Et puis qui était ce mage Mugen ? Qu’est-ce que tout cela signifiait ?
Comment savait-il qu’ils étaient ici ? Avait-il capturé les autres ? Des tonnes
de questions tournaient dans la tête de Andrew, qui avait un air sévère et plus
que sérieux, au grand étonnement de Gabriel qui sur le coup se calma et
l’observa, alors que le petit dragon de son côté, qui venait d’être lâché,
s’avançait gaiement vers les soldats histoire leur dire un petit bonjour à sa
façon…
A suivre …
en