Akaitsuki
(Chroniques de
Yakuza)
Titre
:
Akaitsuki
Auteur : Val-rafale et Tenshi
Chapitre : 15
Genre : Yaoï. Policier / Intrigue / Action.
Couple : Toujours mystérieux
Disclamer : Ils leurs appartiennent toujours - ~
Pensée ~ :
Tournant
L’après
midi venait tout juste de débuter. L’inspecteur Sakura Maxwell marchait dans les
rues de l’ancien quartier des plaisirs, Gion. Il avait un important rendez-vous
qui l’attendait ici même. Son plus important informateur avait une chose rare à
lui remettre en mains propres, le plus rapidement possible. Ils devaient se
retrouver tous les deux vers deux heures de l’après midi. L’argenté avait une
demi heure d’avance. Cependant, cette dernière avait été calculée, lui
permettant de s’assurer qu’aucunes personnes suspectes n’erraient dans les
environs. Il ne voulait pas tomber dans un piège tendu par ceux qu’il
pourchassait ardemment. Il avait déjà pris pas mal de risques en demandant à son
contact de lui apporter un autre échantillon d’une drogue, pas encore en vente
dans la rue, mais dont les résultats des tests étaient parvenus à ses oreilles.
Il avait fait en sorte d’en obtenir une première dose afin de l’analyser, une
semaine auparavant. Hélas, sa rencontre avec un jeune homme au combien
dynamique, l’avait contraint à s’en séparer. En effet, suite à la chute de la
souris dans une flaque d’eau, Sakura avait recouvert celui-ci de son manteau.
Manteau dans lequel était cachée la fameuse drogue… Résultat, il devait en
retrouver. Telle était le but de ce rendez-vous.
Tout en pensant aux évènements de la semaine passée, l’argenté s’arrêta devant
un salon de thé dont l’enseigne se voulait discrète. Avec une certaine assurance
mais dépourvut de brutalité, il pénétra dans les lieux, se dirigeant vers le
comptoir. Il s’inclina avec grand respect devant une jeune femme tout en
demandant une table ainsi qu’une théière de thé vert. Il s’installa puis
attendit sa commande. Il en profita pour sortir un calepin dans lequel il nota
quelques petites choses concernant certaines familles Yakuza agissant en ville.
Tout en écrivant, il surveillait la porte d’entrée. Il espérait que son contact
ne mettrait pas trop de temps pour le rejoindre. Il avait encore pas mal de
chose à faire après ça. Il n’avait vraiment pas de temps à perdre.
Sakura se servit une tasse de thé, patientant avec le plus grand calme. Il
entendit alors la porte s’ouvrir sur un jeune homme portant un long manteau
noir. Ses cheveux sombres tombaient devant ses yeux eux aussi couleur de
l’ébène. Il chercha un instant du regard quelque chose avant de se diriger vers
l’argenté. Ce dernier se leva un instant afin de le saluer puis tendit une main,
montrant une place face à lui.
- Vous êtes en avance. » Fit remarquer le contact de Sakura.
- Hm… Vous l’avez ? »
- Oui… »
Le jeune homme fit glisser une petite boite sur la table de la taille d’un écrin
pour bague. Sans perdre de temps, l’inspecteur de police la rangea dans la poche
intérieure de sa veste. Il prit ensuite le temps de terminer son thé avant de se
lever. Il observa son informateur tout en posant une enveloppe sur le bord de la
table.
- Terminez le thé. Il est très bon. Au revoir. »
Sans attendre de réponses, Sakura quitta le salon de thé pour regagner sa
résidence à l’extérieur de la ville. Maintenant que la drogue était en sa
possession, il allait pouvoir l’analyser afin de découvrir ses composants. Il
espérait d’ailleurs parvenir à trouver un remède contre ce mal avant qu’il ne
soit commercialisé dans la rue. L’argenté était décidé, presque obsédé par cela.
*****
Après avoir sauvé son protégé d’un enlèvement, Tetsu avait décidé de le ramener
au quartier général de son groupe. Il avait roulé relativement vite dans les
rues de la ville, inquiet pour le jeune homme assis à ses côtés. Il n’était pas
sorti de cet état de prostration qui l’avait saisit après le suicide de son
agresseur. C’était compréhensible dans un sens. Il ne devait jamais avoir
assisté à ce genre de scène… N’importe quelle personne dite normale ne pourrait
supporter de voir ce genre de spectacle. Le plus compliqué était de maintenant
parvenir à lui faire oublier ces images qui allaient rester graver dans son
esprit.
Pensant à tout cela, le brun appuya un peu plus sur l’accélérateur. Sa voiture
fit un brusque bond en avant. Le conducteur, s’apparentant plus à un pilote,
tourna assez brusquement le volant sur la gauche. Il continuant en ligne droite
sur un kilomètre puis prit sur sa droite. Il roula encore pendant quelques
mètres et se gara enfin devant un bâtiment haut de cinq étages. Là, Tetsu se
glissa hors du véhicule, en fit le tour avant d’ouvrir la porte passager. Il
détacha doucement Mickaël puis le saisit par le bras, le tirant afin de le faire
sortir. Sans un mot, il le tira vers l’immeuble. Ils empruntèrent l’ascenseur
qui les mena au quatrième étage. Quittant la cabine, l’aîné entraina le chiot
perdu le long d’un couloir. Il s’arrêta devant une porte qu’il franchit toujours
en tirant son jeune compagnon. Il enleva ses chaussures puis celles de son
invité. Il le tira ensuite doucement, empruntant un petit couloir qui les mena
dans un grand salon. La baie vitrée donnait au sud, baignant la pièce d’une
douce lumière chaleureuse. Le mobilier était relativement simple, un canapé et
deux fauteuils entourant une table basse ainsi qu’un buffet bas accolé contre un
mur. Juste en face du canapé, se trouvait un grand meuble contenant du matériel
vidéo classique, une télé couleur un peu plus grande que la moyenne et un
lecteur DVD placé juste en dessous. Dans un coin, près de la fenêtre, il était
possible de voir un meuble d’ordinateur. Le ronronnement de l’unité centrale
permettait d’affirmer que la machine était en fonctionnement. En pénétrant plus
dans le salon, le visiteur découvrait une autre partie de la salle qui devait
très certainement servir à prendre les repas à en juger par la table trônant en
son centre. Un peu plus devant eux, un autre couloir était visible, menant très
certainement aux chambres ou autres pièces appartenant aux membres du groupe.
N’importe quelle personne se serait arrêtée afin d’observer les environs.
Cependant, Mickaël n’eut aucune réaction. Son regard était toujours aussi vide,
un peu comme si une chose était morte en lui. Dans un sens, c’était le cas…
Néanmoins, Tetsu était décidé à lui changer les idées même s’il savait que cela
le hanterait encore pendant quelques temps. Décidant de ne pas se soucier de ce
fait pour le moment, le tueur saisit doucement la main du jeune homme, le tirant
vers le canapé. Il l’obligea à s’installer avant de le fixer, son regard
toujours aussi froid et dur.
- Mickaël ? Désirez-vous quelque chose à boire ? Un verre d’eau ? Ou autre ? »
Demanda-t-il d’une voix calme.
Un long moment s’écoula avant que l’interpellé ne réagisse et ne secoue la tête
de gauche à droite en signe de négation. Il avait les yeux toujours baissés vers
le sol. Il entendait parfaitement tout ce que Tetsu lui disait mais les mots
mettaient un peu de temps avant d’arriver à son cerveau, trop plongé dans ce
souvenir terrifiant.
Posant une main sur son épaule, le tueur tenta d’attirer son attention sur lui.
Il parvint à lui faire relever la tête, croisant son regard terne et comme mort.
Il lui remit une mèche de cheveux en place avant de s’installer à ses côtés. Il
ne cessait de le fixer, cherchant un moyen de lui faire oublier la scène dont il
avait été témoin. Autant dire que pour le moment, il ne savait comment faire.
Le tueur lâcha un léger soupir tout en portant son regard sur l’extérieur puis
sur la table basse face à lui. Il se pencha et saisit un paquet de cigarettes.
Il en sortit avant de l’allumer, la calant entre ses lèvres. L’aîné souffla un
nuage de fumée avant de reposer ses yeux sur son jeune compagnon. Ses lèvres
s’entrouvrirent mais alors qu’il s’apprêtait à parler, la présence d’une tierce
personne l’interrompit.
- Junior ? » Fit-il en fronçant un peu les sourcils. « Que fais-tu ici ? Tu ne
devais pas être au casino ? »
- Je t’expliquerai plus tard. » Répondit l’interpellé en s’avançant. « Qui
est-ce ? »
Il désigna Mickaël de la tête tout en s’approchant encore. Tout comme son
leader, il alluma une cigarette avant de se placer près de la fenêtre, attendant
une réponse qui ne vint pas. Il fixa donc le brun installé aux côtés de Tetsu.
Finalement, il posa son bâton de nicotine dans un cendrier et vint poser un
genou face à lui. Il fit un mouvement de la main devant ses yeux afin d’attirer
son attention. Après avoir obtenu l’effet souhaité, un fin sourire étira ses
lèvres.
- Bonjour. Je me nomme Ryo. » Se présenta-t-il avec calme. « Et vous ? »
Le jeune homme ne répondit pas, observant simplement son vis-à-vis, toujours
sous le choc. Il restait là, immobile, le fixant sans le regarder. Le tueur
constatant cela posa un regard sur Tetsu avant de revenir à leur « invité ». Il
était certain que quelque chose s’était passé. Quoi, il ne pouvait le dire, mais
l’importance devait être conséquente pour plonger quelqu’un dans un tel mutisme.
Comprenant au moins cela, Ryo allait reposer sa question quand son vis-à-vis, à
sa plus grande surprise, eut enfin une réaction.
- Mickaël… »
Le ton fut presque robotisé. Comme si la question venait d’être comprise et que
la réponse logique était venue d’elle-même. Pour preuve, le jeune homme resta
stoïque sans rien donner de plus que son simple prénom. Ryo arqua un sourcil
devant cela avant de revenir à Tetsu. Il se redressa et reprit sa cigarette
avant de la porter à ses lèvres.
- Cible ou témoin ? » Demanda ce dernier en rejetant un nuage de fumée. « Il est
rare que tu ramènes du boulot à la maison… »
Tetsu, à cette question, écrasa sa cigarette avant de se lever sans prononcer le
moindre de mot. Il se dirigea vers la fenêtre pour poser son regard sur la rue.
Ryo le laissa faire, comprenant par cette réaction que l’affaire était sérieuse
bien que non prévue. Car l’équipe n’avait pas l’habitude de travailler pour
plusieurs patrons en même temps. Revenant donc au jeune homme qui n’avait
toujours pas bougé du fauteuil, il reprit sa position genou à terre pour se
retrouver à sa hauteur, avant de sourire doucement. Il était évident que
brusquer leur nouvel invité n’était pas la solution pour le sortir de son
mutisme. Le tueur d’élite avait une autre une idée en tête. Une idée qui avait
parfaitement fonctionnée avec une certaine souris… Donc, avec douceur, il ramena
la même mèche de cheveux que Tetsu avait ramené quelque temps plus tôt derrière
l’oreille de Mickaël, avant de reprendre calmement.
- Mickaël ? C’est un joli prénom. Anglais ? Américain ? »
- Américain… » Avait répondu le brun après un long moment de silence.
Un moment de silence survint auquel Ryo s’était attendu. Il avait donc patienté,
laissant simplement son vis-à-vis réagir ce qui n’allait pas tarder à arriver.
- Et que viens-tu faire ici ? Vacances ? »
Là, il n’eut pas de réponses. Juste un léger enfoncement des épaules de Mickaël
et un afflux de larmes dans les yeux de ce dernier, preuve que sa présence dans
le pays devait être liée à ce qui venait de se passer. Songeant que son rôle
n’était pas de jouer les détectives privés, il reprit vite la parole. Il ne
tenait pas particulièrement à faire face à une crise de larmes…
- D’ailleurs, pour un étranger, tu parles bien Japonais… »
A part cet accent typiquement occidental, il maîtrisait bien la langue. Mickaël,
touché par le compliment, releva un instant le regard, prêt à remercier l’homme
quand une ombre s’invita à la conversation. Ce qui fit sursauter le garçon qui
se leva instinctivement pour rejoindre Tetsu prêt de la fenêtre, s’en servant
comme bouclier. Réaction qui surpris Tetsu ne s’attendant pas à être pris comme
gardien par ce dernier après la scène du parc, et qui amusa l’ombre. Ryo nota
juste que ce jeune homme, qu’importe ce qui avait bien pu arriver, savait réagir
comme il fallait et savait aussi à qui donner sa confiance. Enfin l’espérait-il…
- Ryu… » Soupira le tueur d’élite en revenant à ce dernier. « Tu pourrais
prévenir quand tu entres dans une pièce et qu’il y a un invité… »
- Un invité ? Ah bon ? » Répondit l’interpellé jouant les innocents. « Bah
maintenant il sait que je suis ici. »
Trottinant presque jusqu’à Mickaël, il s’arrêta à distance raisonnable, quand
son regard croisa celui de Tetsu. Il n’y avait pas de doute à avoir quand au
message : « tu fais un pas de plus et tu es mort ! ». Et Ryu ne tenait pas plus
que cela à mourir aujourd’hui. Pas après ce câlin qu’il venait de faire et dont
il ressentait encore les effets positifs.
- Bonjour ! Je suis Scott et toi ? Tu es perdu ? Tu sais que tu es mignon ? D’où
viens-tu ? Tu as réussi à apprivoiser Reiji ? Tu sais que c’est Miraculeux ? Tu
me donnes ta recette ? »
Ryu aurait pu continuer longtemps comme ça, si son oreille n’avait pas été tirée
avec douleur à l’instant.
- Aïe ! Mais ça ne va pas ? Ca fait mal voyons… » Informa t’il avec un ton
enfantin rudement mal joué. Après tout, le comédien de l’équipe ce n’était pas
lui, mais Nezumi. « Y’a pas de raisons qu’il y ait que Tetsu qui puisse jouer… »
Il ne manque plus que le ton plaintif et hop, on aurait cru que la souris était
de nouveau en pleine santé et pleine d’énergie. Le ton plaintif ne vint pas. Au
lieu de cela, Ryo entraîna son équipier vers le canapé pour le calmer.
- Cesse cela tu veux ? Tu ne vois donc pas qu’il est sous l’effet d’un choc ? »
Soupira Ryo un poil dépité sur le coup.
- Mais si ! Il faut être aveugle pour ne pas le voir. Mais, moi, monsieur,
j’essayais de le faire rire ! »
- Rire ? Tu veux dire l’effrayer encore plus … »
La semi dispute aurait pu durer encore longtemps si un éclat de rire subit ne
les avait pas coupé. Mickaël, qui était jusqu’à maintenant prisonnier de la
scène du parc, avait été ramené à la réalité par le bombardement de questions de
Ryu. Et à présent, il assistait à la scène avec, d’abord, stupeur puis
énormément d’amusement. Il devait avouer que rire faisait du bien. Il ne savait
pas trop pourquoi, mais dans un sens, ça le soulageait. Tetsu fut tout autant
surpris par la réaction de ce dernier, mais dans un sens rassuré de le voir
enfin réagir. C’était un pas en avant. Même si ce pas avait été causé par Ryu et
ses idées tordues…
- Ah ! Tu vois ! Je suis trop fort ! »
Amusé d’avoir raison, Ryu laissa Ryo en plan et se dirigea en trottinant jusqu’à
Mickaël. Il lui prit la main et y déposa un baiser. Un geste tout ce qu’il y a
de charmeur qui lui valut un autre regard glaciale de son cher chef d’équipe.
Mickaël, lui, de son côté, récupéra sa main et recula un peu, ne préférant pas
trop rester prêt de cet inconnu. Il ne lui faisait pas vraiment peur. Mais son
comportement était trop intimidant voir bizarre pour qu’il se risque à le
laisser trop l’approcher. Après tout, il n’était pas son ami…
- Quel beau sourire que je vois. A qui appartient-il ? »
- Euh… Moi. Mickaël… »
- Mickaël ? Mais quel joli nom ? Américain je dirais étant donné ton accent. Où
as-tu rencontré notre cher Tetsu ? »
- Tetsu ? » Demanda surpris le brun alors qu’une de ses mèches blanches lui
retombait sur le visage.
Ryo, voyant que Tetsu justement était sur le point de tuer Ryu, décida
d’intervenir. Certes une petite punition ne lui ferait pas de mal, mais bon, il
valait mieux qu’il n’y ait aucun témoin quand cela arriverait. Il s’approcha
donc de la scène et fixa Mickaël toujours avec un simple sourire.
- Tetsu est Reiji. C’est un surnom donné par Scott. Allez, viens… Si tu me
montrais tes talents culinaires. Nous avons un malade et il doit prendre de la
soupe. Enfin si tu veux m’aider bien entendu. »
Le tueur avait opté par le tutoiement avec leur jeune invité. C’était un moyen
de le mettre à l’aise. Visiblement, Mickaël avait bien besoin d’être rassuré ou
plutôt d’oublier ce qui lui était arrivé. Lui prenant la main avec une certaine
délicatesse, Ryo tira leur invité, l’entrainant dans la cuisine. Il ferma la
porte derrière eux avant de se tourner vers le petit brun qui clignait encore
des yeux surpris par la façon dont il avait été enlevé. Secouant la tête de
gauche à droite, il préféra ne pas lui en tenir rigueur. Son vis-à-vis semblait
être quelqu’un de gentil, digne de confiance. Il fallait dire que pour le jeune
Carter, rares étaient les personnes à qui il n’accordait pas tout son crédit. Il
avait d’ailleurs souvent tendance à se fier à n’importe qui, sans chercher à
connaître ceux qui l’abordaient. La preuve en était sa réaction envers Tetsu. Il
avait eut de la chance de ne pas tomber sur un sale type qui aurait très bien pu
chercher à profiter de son innocence. Heureusement que le leader du groupe Mayoi
n’était pas ainsi.
Sortant plusieurs ingrédients nécessaires à la confection d’une bonne soupe, Ryo
observait de temps à autre le jeune homme à ses côtés qui attendaient patiemment
les consignes. Dès qu’il eut terminé de tout préparé, il se tourna vers lui, un
fin sourire étirant ses lèvres.
- Bien, tu sais comment faire une soupe ? » Demanda-t-il en sortant un couteau.
- Euh… Oui… Enfin je crois… » Répondit Mickaël en s’approchant.
Après une grosse hésitation, il saisit le couteau puis commença à couper les
légumes avant de les mettre dans une casserole d’eau, préparée par le tireur
d’élite. Il mit un peu de sel dedans puis recouvrit le tout. Ceci fait, il se
tourna vers son aîné en penchant la tête sur le côté.
- Vous avez dit que vous aviez un malade. Qu’a-t-il ? » Demanda-t-il en
s’appuyant contre le plan de travail.
- Il a attrapé une bonne grippe. Ce n’est pas très grave mais il est cloué au
lit pour quelques jours. »
- Hm… La soupe lui fera du bien alors. Je vais faire en sorte de bien préserver
les vitamines des légumes. Cela permettra à son organisme de reprendre un peu de
force pour mieux se défendre. »
- C’est l’idée. »
Lui dédiant un nouveau sourire, Mickaël souleva le couvercle de la casserole
pour piquer les légumes. Il vérifia ainsi la cuisson avant de recouvrir à
nouveau le plat. La cuisson allait prendre quelques minutes, ce qui lui donnait
pas mal de temps pour discuter avec son hôte. Cet homme l’intriguait, surtout
cette attitude qu’il prenait alors qu’il le connaissait à peine. Il était
amicale, bienveillant, un peu comme le serait un grand frère. Cela lui rappelait
un peu Christopher. D’ailleurs à cette pensée, Mickaël perdit son sourire alors
que son regard se voilait. Il baissa la tête en repensant à tous les évènements
survenus jusque là. Il ne pouvait croire les paroles de cette personne qui avait
tenté de le ramener à son père. Il commençait à penser que tout n’était que
manipulation de ce dernier afin de le ramener à lui. Il voulait certainement
encore l’enfermer, lui démonter par tous les moyens qu’il était incapable de se
débrouiller seul. Mais il n’y arriverait pas. Il savait que son frère était
encore en vie. Il le sentait…
Plongé dans ce tourment, il ne vit pas Ryo s’approcher de lui. Ce fut seulement
le contact de sa main sur son épaule qui le fit légèrement sursauter et
redresser la tête. Il cligna des yeux quelque peu surpris avant de finalement
retrouver son sourire.
- Pardon… » S’excusa-t-il en remettant une mèche rebelle derrière son oreille. «
Alors parlez-moi de votre malade ! »
- Hm… La souris… Et bien, il a une bonne grippe suite à une chute dans une
flaque d’eau. »
- Une flaque d’eau ?! » Fit quelque peu surpris le jeune homme avant d’éclater
de rire. « Mais comment a-t-il fait ? »
- Il a voulu jouer. » Répondit Ryo en soupirant longuement.
- Jouer ? »
Le brun pencha la tête sur le côté avant de se mettre à pouffer de rire pour
éclater franchement. Il imaginait très bien la scène d’un jeune homme
particulièrement maladroit tombant dans une flaque d’eau. Il aurait pu demander
les circonstances ayant mené à ce résultat. Cependant, les mots « souris » et «
jouer » avaient suffi à lui faire comprendre la situation. D’ailleurs, son
instinct lui dictait de se méfier de ce malade, s’il était tel qu’il le pensait.
Après tout, il ne devait pas être surnommé ainsi sans raison valable. Il ne
voulait pas vérifier la véracité de ses impressions.
Sentant le regard de Ryo sur lui, Mickaël releva les yeux et l’observa à son
tour. Il pencha légèrement la tête sur le côté tout en lui dédiant un sourire.
Il reprit le couteau afin de piquer, une nouvelle fois les légumes.
- Vous connaissez Reiji depuis longtemps ? » Demanda-t-il en reposant le
couvercle.
- Hm… Depuis pas mal d’années. Nous sommes des collègues et amis. » Répondit
l’aîné en sortant un mixeur. « Tu permets que je te pose quelques questions ? »
- Bien entendu. J’essaierai de répondre avec le plus de franchises possibles. »
Ryo n’en attendait pas moins de lui. Il ne semblait pas de ces personnes mentant
sur leur passé afin de donner une meilleure vision d’eux même. Si cela avait été
le cas, jamais Tetsu ne l’aurait ramené à leur quartier général. Il ne lui
aurait pas non plus apporté son aide comme il semblait l’avoir fait.
Satisfait de la réponse qu’il avait reçue, le tueur tira deux chaises puis prit
place sur l’une d’elle. Il tendit la main vers celle placée de l’autre côté de
la table tout en lui dédiant un sourire. Mickaël installé, Ryo le fixa avec une
certaine intensité.
- Bien… Tu as dit te nommer Mickaël… Mais quel est ton nom ? » Demanda-t-il en
posant un coude sur la table afin de prendre appui dessus.
- Carter… » Répondit le jeune homme en baissant les yeux.
- Carter… Carter… C’est étrange ce nom m’est familier. Tu viens de quelle ville
des Etats-Unis ? »
- Los Angeles. Mais Carter est un nom de famille tellement commun. Vous en avez
peut être déjà connu. Et puis mon père n’est pas quelqu’un de si important,
enfin je pense… »
Le brun n’allait pas dire à son vis-à-vis les doutes naissants en lui concernant
son père. Le fait qu’il ait envoyé quelqu’un pour le ramener au pays ainsi que
l’attitude de cette personne, lui laissait penser que bien des choses lui
avaient été cachées jusque là. Il s’en inquiétait… Son frère devait certainement
en savoir plus que lui sur tout cela. Il devait juste lui poser quelques
questions. Encore fallait-il qu’il retrouve Christopher pour lui demander.
Reportant son attention sur Ryo, Mickaël pencha la tête sur le côté, nouveau,
tout en souriant. Il ne voulait pas se laisser envahir à nouveau par ses
émotions et son inquiétude. Il n’était pas nécessaire que d’autres personnes se
fassent du souci pour lui.
- Vous avez d’autres questions, je présume ? » Demanda-t-il poliment.
- Hm… Ton père est James Carter ? C’est bien lui ? Le célèbre homme d’affaire ?
»
- Pas célèbre ! » Insista le cadet en croisant les bras. « Mais c’est bien lui.
»
- Hm… »
Ryo jugea inutile d’insister sur ce point pour le moment. Son vis-à-vis semblait
s’acharner à penser que son père n’était pas quelqu’un d’important. Il voulait
certainement éviter de voir la réalité en face, une façon comme une autre de ne
pas souffrir plus encore. Mais ce que le jeune homme pouvait penser de son père,
n’était pas grave en soit.
Lentement le tueur se leva afin de se diriger vers un placard. Il l’ouvrit et
sortit deux tasses qu’il posa sur la table. Il saisit ensuite la cafetière et
versa un peu de liquide brun dans celle de son invité, suivi de la sienne. Ceci
fait, il remit le récipient en place avant de se tourner vers son compagnon.
- J’espère que tu aimes le café. »
- Je préfère le capuccino. » Répondit Mickaël avec honnêteté.
- Oh… D’accord ! »
Le brun reprit la tasse et la vida simplement dans le bocal sans laisser le
temps au jeune homme de dire quoi que ce soit. Il sortit une casserole qu’il
remplit d’eau avant de la poser sur la plaque électrique. Pendant que celle-ci
chauffait, il sortit un petit sachet sur lequel était noté en gros caractère «
capuccino ». Il en versa le contenu dans la tasse puis y ajouta l’eau
bouillante. Ceci fait, il la posa devant Mickaël et s’installa à nouveau à sa
place.
- Je suis désolé, je n’ai que de l’instantané. » Fit-il en souriant doucement.
- C’est parfait ! Mais vous n’étiez pas obligé de faire ça pour moi. »
- Je l’ai fais de bon cœur. » Déclara le brun en portant sa tasse à ses lèvres.
« Dis-moi… Sais-tu ce que nous sommes ? »
- Ce que vous êtes ? » Répéta le jeune fils Carter en penchant la tête sur le
côté. « Oui, vous êtes des tueurs. Je l’ai compris lorsque Reiji est intervenu
dans le parc… Jusque là, je pensais que ce genre de choses n’existait que dans
les films. »
- Comme beaucoup de personnes… Et cela ne te fait pas peur ? » Interrogea le
tireur d’élite avec douceur.
- Pourquoi devrais-je avoir peur de vous ? » Questionna Mickaël avec un fin
sourire. « Si vous aviez voulu me tuer cela serait fait depuis bien longtemps.
Je me trompe ? Et puis vous n’avez pas l’air méchant. »
- Je le conçois bien… Cependant le fait est que nous sommes quand même des
personnes dangereuses. Qui te dit que nous n’allons pas tenter de t’utiliser
contre votre père ? »
- Vous l’auriez déjà fait à mon arrivée au Japon. En plus, vous n’agiriez pas
comme ça avec moi. Je suis certain que vous ne traitez pas vos ennemis avec
autant de gentillesse. L’action de Reiji en est la preuve. »
- Certes… »
Ryo ne pouvait nier tout cela. Il savait que le jeune homme avait raison sur
toute la ligne. Il avait su à merveille les analyser, en très peu de temps.
C’était relativement déstabilisant pour lui. Il avait eut l’espace d’un instant
l’impression d’être mis à nu par son vis-à-vis. Mais il devait se tromper
certainement. Après tout, Tetsu, Ryu ou lui-même avaient montré une facette
positive de leurs personnalités. Par conséquent, Mickaël n’avait eut aucun mal à
remarquer leur tendance à s’occuper des personnes perdues comme lui.
Avalant une nouvelle gorgée de café, Ryo lâcha un léger soupir. Il se leva
doucement pour aller voir où en était la cuisson des légumes. Il éteignit alors
le feu puis vida le contenu de la casserole dans un égouttoir. Mickaël qui ne
manqua rien de la scène, se redressa lui aussi. Il ne vida cependant pas sa
tasse, le liquide étant encore bien trop chaud pour lui. Il se contenta de
rejoindre son vis-à-vis, et chercher autour de lui de quoi écraser les légumes.
Ayant trouvé ce qu’il cherchait, il revint à Ryo et sa tentative de rinçage des
légumes.
- Vous savez, vous auriez du garder du jus de cuisson des légumes pour la soupe.
Sinon le résultat risque d’être plus sec que prévu. Ca serait un peu idiot pour
de la soupe, non ? »
- Il est certain. » Confirma Ryo avec un fin sourire.
Alors que Mickaël se mettait en tête d’écraser les légumes, Ryo de son côté
récupéra le reste du jus de cuisson. Il ne perdait pas des yeux son jeune aide
de cuisine. Il devait avouer que dans un sens, il l’intriguait. Il émanait du
jeune homme quelque chose de déroutant. Un « je ne sais quoi » qui attisait un
peu plus sa curiosité. Ce devait être le même « je ne sais quoi » qui avait
conduit Tetsu à se mêler des affaires de ce dernier.
Récoltant assez de bouillon pour alimenter leur soupe, Ryo s’enquit de sortir un
plat pour mélanger les légumes pressés à son jus de cuisson, et ce, sans lâcher
du regard Mickaël qui souriait comme si rien n’était. Qui aurait pu croire
qu’une demie heure plus tôt, il était prostré dans une scène plus que
traumatisante ?
- Vous savez, si vous avez encore des questions, vous pouvez me les dire… »
Ryo, surpris par la prise de parole de Mickaël, fut ramené à la réalité de
manière assez brutale. Clignant un instant les yeux, cherchant sans vraiment
s’en rendre, de quoi voulait parler le jeune homme, il comprit que ce dernier
avait senti sa curiosité vis-à-vis de lui. Encore cette impression d’être
analysé, sans comprendre comment et pourquoi, décidément, il sentait comme un
malaise quand cela produisait. Cependant, gardant son doux sourire, qui se
voulait rassurant, il posa le plat et s’approcha d’un placard, prenant doucement
la parole.
- Qu’est-ce qui te fait penser que j’ai encore des questions à te poser ? »
- C’est simple… Vous me regardez avec insistance. Vous semblez vouloir lire en
moi pour trouver une information sur un quelque chose que je ne saisis pas. On
dirait que pour vous je suis une énigme. Une énigme pas vraiment dangereuse,
mais intrigante… Je me trompe ? » Demanda le jeune américain, avec cet accent
typiquement du pays.
- Euh… non ! » Répondit avec calme Ryo, bien qu’il était évident qu’il était
surpris par le propos du garçon. « Il est vrai que je suis curieux. Il est
tellement rare que notre Reiji ramène quelqu’un à la maison. » Termina le brun
en une veine tentative de retomber sur ses pieds.
- Vraiment ? Pourtant, il semble quelqu’un de gentil. Bien sûr, tuer n’est pas
une chose bien. J’en suis parfaitement conscient. Et tuer avec un sourire
pareil, ça ne doit pas être normal. Pourtant, cela ne m’effraie pas. En fait,
c’est de voir l’homme se suicider qui m’a plus marqué que le sourire de Reiji… »
Informa Mickaël tout en vidant son plat de légumes écrasé dans la casserole
sortit par Ryo. « Mais ce n’est pas grave. » Fit-il avec le sourire, tout en
continuant sa manœuvre plus que dangereuse, celle de ne faire tomber aucuns
légumes en dehors de son contenant. « Posez-moi vos questions, j’essaierais d’y
répondre avec un grand sérieux. Promis ! »
Ryo, stupéfait, se mit en quête d’aider le jeune homme tout en gardant son
contrôle. Il n’y avait aucun doute, cette personne avait une intelligence bien
développée. Mickaël semblait s’intégrer à la situation avec une facilité qu’il
trouvait presque déconcertante. C’était comme s’il voyait un morceau de leur
souris se balader devant ses yeux. C’en était déstabilisant… Voir effrayant dans
un sens. Cependant, décidant de ne surtout pas montrer son étonnement, il opta
pour une série de questions. Questions qu’il comptait de toute façon poser. Au
final, il arriverait peut être à mettre un nom ou trouver un mot décrivant ce
malaise né en lui depuis qu’il était enfermé dans cette cuisine en présence du
jeune homme.
- Reiji est en effet gentil, mais il n’aime pas le montrer à des inconnus. »
- Ah… » Soupira Mickaël gardant son sourire cependant. « Alors j’ai eu de la
chance ! »
- On peut dire ça. » Fit Ryo souriant toujours avec douceur. « Bien, dis-moi ce
qu’un jeune natif des Etats-Unis vient faire dans notre beau pays qu’est le
Japon ? »
- Mon frère ! Je suis là car le dernier courrier qu’il m’a fait, venait du
Japon. Plus précisément de Kyoto. Après je n’ai plus eu de nouvelles, alors
qu’il m’envoyait au moins une lettre toutes les semaines. Alors j’ai dit à mon
père que j’allais venir ici, au Japon. Bien sûr, il m’a dit que non, que je
n’avais rien à faire dans ce pays, que je ne serais pas capable de me
débrouiller seul sans faire appel à lui… En réponse, je lui ai dit que je me
moquais de son aide, et que je pouvais me débrouiller seul. Inutile de dire que
mon père n’a pas beaucoup apprécié mes propos. Mon dos s’en souvient encore. »
Ironisa avec une légère grimace le jeune homme. « Mais je suis quand même parti.
Quand mon passeport est arrivé, j’ai pris le premier avion. Ce qui était une
grosse erreur, j’avoue. Je n’avais ni argent, ni lieu de logement, ni travail.
J’arrivais dans un pays étranger avec seulement la connaissance de la langue et
rien d’autre. Heureusement que dans mon école, il y avait des cours de japonais
obligatoire… Mais finalement j’ai eu de la chance. Dans la même journée, alors
que j’arrivais tout juste, j’ai trouvé un appartement et un emploie. Enfin
d’abord un emploie et ensuite un appartement. Monsieur Yamasu a été très gentil
avec moi. Voilà comment je suis arrivé ici. Maintenant je suis serviteur de
monsieur Yamasu et je vis dans un petit appartement à Demachi [1]. »
Satisfait de son petit résumé, Mickaël se mit en tête de mélanger les légumes
écrasés au bouillon, tout en ajoutant un assaisonnement adéquat au plat. Il
remua énergiquement sa soupe qui se formait peu à peu, rajoutant ainsi, crème
fraîche, sel, poivre, et un peu de beurre. Il espérait que le plat plairait à la
personne à qui, il était destiné. Il devait avouer qu’il n’en avait pas fait
depuis bien longtemps. Il s’afférait donc, loin de se formaliser du silence que
laissait naître Ryo qui ne l’avait pas quitté des yeux. Réalisant d’ailleurs cet
état de fait, le tueur secoua doucement la tête avant de revenir à la
préparation. Il glissa la main dans les cheveux de Mickaël, un geste pour le
féliciter de son travail avant de couper ce silence un peu trop envahissant.
- Et bien… Tu es un vrai chef ! »
- Merci. C’est gentil. Mais avant de dire ça, il faut d’abord goûter, alors,
faites « Ahhhhh ! ». »
Le jeune invité tendit une cuillère à son vis-à-vis qui ouvrit la bouche
naturellement à l’approche de cette dernière. Il goûta alors la soupe, un léger
éclair dans les yeux. Il n’y avait aucun doute quand aux dons culinaires du
jeune homme, c’était un réel régal. Il n’avait pas mangé une soupe aussi bonne
depuis… Bah en fait, il n’en avait jamais mangé avant d’aussi bonne. Même celle
de Tetsu n’avait ce petit côté onctueux absolument divin.
Souriant, appréciant grandement le plat, il nota néanmoins un léger manque.
Manque qu’il s’empressa de dire immédiatement à son compagnon de cuisine, sans
revenir à l’histoire que ce dernier venait de lui conter. Il ne fallait pas être
stupide pour comprendre ce qu’il s’était passé ensuite. S’il cherchait son
frère, il avait dû prendre un détective… Il ne préférait pas savoir le genre,
même s’il en avait une petite idée aux vues des évènements. Il ne préférait pas
non plus interroger Mickaël sur l’identité du suicidé qui l’avait tant
traumatisé sur le coup, et qui le traumatisait sûrement encore. Il devait
laisser un peu de temps à ce jeune garçon avant de chercher à drainer d’autres
informations. Même si le fait qu’il soit le serviteur d’un Yamasu ne lui
plaisait pas trop. Enfin ce n’était pas le moment de penser à tout ça… Il avait
le temps de réfléchir à tout cela, et surtout il lui fallait, en premier lieu,
en discuter avec les autres membres du groupe.
- Hm… Un véritable délice, à un point prêt… Il manque peut-être un peu de sel. »
- Ah bon ? » Demanda surpris le jeune homme avant de goûter lui-même et
constater la même chose. « Ah bah oui ! » Fit-il avec le sourire avant de
rajouter un peu de seul. « Voilà, soupe finie ! Il ne reste plus qu’à la donner
à votre malade. »
- En effet… Et qui mieux que le cuisinier est le plus disposé pour apporter son
plat plein de réconfort ? »
- Euh… » Hésita Mickaël en rougissant légèrement. « D’accord, mais vous venez
avec moi hein ? »
Souriant devant la question pleine d’innocence de ce dernier, Ryo ébouriffa à
nouveau les cheveux de jeune homme avant de reprendre la parole. Il nota bien
évidemment le geste de son invité, celui de remettre ses cheveux en place en
gonflant les joues de « non appréciation » quant au geste. Mais il préféra
passer tout simplement outre, appréciant grandement ces expressions qui sans le
vouloir, lui faisaient tant penser à Nezumi, même s’il n’était pas possédé par
la même énergie.
- Il était évidant qu’il en serait ainsi voyons ! » Se moqua doucement Ryo en
servant dans un bol un peu de soupe qu’il mit sur un plateau. « Bien, si nous y
allons ? »
Mickaël acquiesça d’un signe de tête, bien qu’inquiet de cette future rencontre.
Il avait un mauvais pressentiment. Quelque chose qui lui disait qu’il devait
rester sur ses gardes. Pourtant il était certain qu’ici, il ne courrait aucun
danger. Alors pourquoi cette petite voix, dans sa tête, lui dictait de ne pas y
aller ? Voir même de s’enfuir ? Il ne comprenait pas. C’était comme s’il y avait
quelque chose n’anormale. Peut être était-ce à cause des paroles du tueur… Le
fait qu’il ait accepté de l’accompagner et surtout que cela passait pour une
évidence. Aux yeux de Mickaël, Ryo n’était pas obligé de venir. Il aurait très
bien pu le laisser aller voir le malade tout seul afin de faire connaissance
avec lui. Ce qui n’était pas le cas. Il semblait même évident qu’il refuserait
catégoriquement de le laisser seul avec. Pourquoi ? Que cachait ce malade ? Se
perdant dans ses pensées, réfléchissant à tout cela, il suivit son aîné…
Remarquant l’hésitation et la crainte de son compagnon, le tueur se mit
doucement à sourire avant de reprendre la parole.
- Ne t’inquiète pas, les souris ne mordent pas. Elles sont juste pleines
d’énergie même malade. »
A ces mots, Mickaël releva les yeux et se mit à sourire. Rassuré sans trop
savoir pourquoi, il manqua néanmoins de se cogner à Tetsu qui avait surgit
devant la porte de la cuisine, coupant leur progression d’un coup. Reculant sur
le coup, il fixa ce dernier avec stupeur alors que son vis-à-vis prenait le
plateau contenant le bol de soupe.
- Merci Ryo, je vais m’occuper du reste ! »
Ne comprenant pas ce qu’il se passait, il vit l’interpellé laisser sa place sans
rechigner. Il lui offrit un dernier sourire avant de disparaître dans le salon,
le laissant en tête à tête avec Tetsu. Chose qui ne l’effraya pas vraiment, même
si à présent, il notait parfaitement la différence entre les deux hommes. Reiji
était magnétique. Quelque chose, en lui, l’attirait. Il avait aussi ce sentiment
de sécurité et de plénitude en sa présence. Alors qu’avec Ryo, il avait
l’impression d’être avec Christopher. Oui, Ryo ressemblait à un grand frère,
alors que Reiji, lui, il ressemblait à un protecteur. Voilà à quoi pensait
Mickaël avant d’être de nouveau sorti de ses pensées.
- Allez, viens ! La soupe va refroidir… »
- Euh … oui ! »
Sans plus attendre, Mickaël se remit en route alors que Tetsu, lui, de son côté,
repris la parole. Il semblait avoir pas mal de choses à lui avouer u lui
apprendre avant d’entrer dans la chambre du fameux malade.
- Alors sache qu’il y a plusieurs règles avec Yuu. »
- Des règles ? » Fit Mickaël surpris.
- Oui… des règles. Ecoute-les biens ! » Reiji vit le signe d’acceptation de la
tête de son jeune protéger, donc continua. « Première règle : Ne jamais
approcher Yuu sans avoir de raison pré-établies et surtout sans garder une
certaine méfiance. Deuxième règle, et la plus importante : Ne jamais, au grand
jamais, lui donner un aliment qui contient de la caféine ou de la théine. Tu as
compris ? Jamais ! »
- Euh… oui… mais pourquoi ? » Demanda peu assuré l’américain.
- Il est allergique… » Répondit le tueur sans plus s’attarder sur le sujet du
pourquoi. « Troisième règle : Ne dis jamais oui à une de ses idées. Tu ne
risquerais pas de comprendre ce qu’il t’arrive. Et dernière règle : Ne jamais
jouer avec lui. Qu’importe ce qu’il te dit. Laisse le parler et tout ira bien !
Compris ? »
- Oui… je crois… »
Mickaël était certain de rien. Il trouvait ces règles un peu bizarres. On
croirait qu’ils allaient au chevet d’un enfant. Mais il était certain que ce
n’était pas le cas. Alors pourquoi toutes ces recommandations ? Secouant
doucement la tête, il préféra ne plus y penser. Il se contenta de suivre son
aîné qui venait justement de s’arrêter. Il fixa alors la porte fermée et
entendit alors une voix plaintive accompagnée de celle d’un homme qu’il avait
déjà entendu, celle de Scott. Surpris, il regarda Tetsu qui le gratifia d’un
regard rassurant. Enfin rassurant pour Mickaël qui arrivait, sans savoir
comment, à lire dedans. Pour le reste du monde, ces yeux restaient glacial… Il
vit alors ce dernier se saisir de la poignée de la porte avant de l’ouvrir et
laisser place à une scène qui laissa le jeune homme dans la perplexité la plus
totale…
- Alors Ryu… dis moi !! Il est comment ? » Implorait Nezumi, à genoux sur le
lit, le teint pâle et le corps tremblant. « Décris-moi ce petit chiot ! »
- Non ! Non ! Non ! » Répondit avec amusement et jeu Scott.
- Mais euh… t’es pas gen… »
La prise de parole cessa là quand la présence du leader du groupe se fit
ressentir. En un clin d’œil, Yuu se recoucha et Scott se redressa, déglutissant
chacun à leur tour. Tous deux savaient que ça allait chauffer pour eux. L’un
plus rapidement que l’autre, mais le résultat resterait le même : ils seraient
punis. Mais ne montrant rien de cela, Ryu se contenta de sourire, tout en fixant
le petit animal caché derrière leur cher bourreau.
- Oh mais que voilà, la jeune brebis qui a retrouvé sa motricité ! Y’a pas à
dire, Junior est un chef en la matière de réparer les objets cassés ! »
- Ryu ! » Coupa Tetsu froidement. « Sort d’ici ! »
Si Mickaël ne pouvait voir le regard assassin de Reiji, Scott, lui, de son côté,
le vit parfaitement. Si bien qu’en un temps record, il quitta les lieux, ne
préférant pas demander son reste. La scène fit légèrement sourire le jeune
homme, toujours caché. Il posa alors son regard sur le grand malade, qui,
étrangement, eut un sourire qui n’avait rien de bon. Sur le coup, le fils Carter
eut l’envie de fuir loin de cette souris. Si les hommes, qu’il avait croisés
depuis sa rencontre avec Tetsu, avaient quelque chose de dangereux en eux, Yuu
avait lui quelque chose d’effrayant et de bien plus menaçant encore. C’était
quelque chose que n’arrivait pas à nommer Mickaël mais il sentait un certain
malaise naître en lui. Son instinct lui dictait de vraiment se méfier de cette
souris, de bien écouter Reiji et ses conseils.
- Venez… »
A cet ordre qui n’en était pas vraiment un, Mickaël pénétra dans les lieux avant
de voir la porte se refermer derrière lui. Il fixa cette dernière un court
instant, se disant que maintenant il était trop tard pour reculer. Il revint
donc au lit, et prit la parole timidement.
- Euh… Bonjour… Je suis Mickaël. Je vous ai fait de la soupe avec Ryo pour que
vous alliez mieux… »
Un éclair s’illumina dans les yeux de Yuu, alors qu’une mine d’enfant malade se
dessinait sur son visage, au grand désespoir de Tetsu. Il savait qu’il allait
assister, sans rien pouvoir y faire, à un nouveau jeu de scène de leur souris
légendaire… La comédie était son meilleur atout… S’il n’était pas devenu tueur,
il ne faisait aucun doute que le métier d’acteur lui aurait convenu à merveille.
- Oh… De la soupe ?... J’aime pas la soupe… t’aurais pas des bonbons dit ? »
- Non… juste de la soupe… » Répondit Mickaël tout en s’approchant du lit. « Tu
vas voir, c’est la meilleure soupe du monde… »
- Vraiment ? »
- Oui… C’est une recette de mon grand frère. Il me la faisait toujours quand
j’étais malade. »
Bon cette dernière phrase était un pieux mensonge, mais il avait comme
l’impression qu’il devait user de cet argument pour faire manger la soupe à son
vis-à-vis. Et ça ne manqua pas…
- Ah bon ? Alors je veux bien goûter ! » Acquiesça avec le sourire Yuu.
Et en un mouvement plus que rapide il attrapa la soupe et commença à la dévorer,
comme s’il n’avait pas mangé depuis des jours. Clignant des yeux, Mickaël le
regarda faire. Tetsu se passa la main sur le visage alors qu’à l’éclair dans les
yeux de leur informaticien, il sentait les ennuies arriver à grand pas…
A suivre …