Une marque indélébile
( La vie d’un ange de la mort)
)





Titre :  Une marque indélébile
Auteur : val-rafale
Chapitre : 13
Genre : Yaoi / Policier / Fantastique / Angst
Couple : ????
Disclamer : Tous les personnages de cette histoire son fictif et crée par moi même. Merci de ne pas les utiliser sans mon consentement.


Indélébile


Le professeur Leblanc était installé dans son salon, au calme, un livre entre les mains. Le jeudi… Ce jour était le seul qu’il daignait s’accorder pour se reposer. Même le dimanche, il trouvait le moyen de travailler. Le jour du Seigneur… Combien de personnes seraient choqué par ce fait. Mais le français n’était pas croyant, pour ne pas dire athée. Alors pourquoi le dimanche serait-il différent des autres jours pour lui ? C’était pour cela qu’il continuait de faire son travail pour l’organisation. Mais pourquoi choisir le jeudi comme jour de repos ? La raison n’était pas bien compliquée. Il faisait parti de ceux qui avait eut pour habitude de ne pas aller en classe le jeudi qui fut ensuite remplacé par le mercredi. Une habitude est tellement difficile à perdre. De toute façon, ses patrons ne le lui avaient jamais reproché. Le professeur avait toute leur confiance et ils lui accordaient ce qu’il désirait lorsqu’il avait une demande à formuler. Ce qui était rarement le cas… Mis à part dans le domaine du travail, Leblanc n’avait aucune exigence. Il voulait juste du bon matériel, si possible dernier cri et le plus efficace possible afin que ses recherches soient le mieux menées. Mis à part cela… Rien. Il ne réclamait même pas des vacances. Les dernières qu’il avait prises, remontait à… Il ne s’en souvenait plus vraiment tant cela demeurait lointain. Beaucoup de ses proches amis lui avait souvent fait la réflexion sur ce détail, lui conseillant de faire attention à sa santé, qu’il commençait à prendre de l’âge. Mais il ne les avait jamais écoutés. Cela le faisait au contraire sourire, l’amusait. Certes, il était enchanté de voir plusieurs personnes prendre soin de lui, cependant, il se sentait parfaitement capable de continuer ce rythme qu’il s’imposait. Et puis, il n’était pas si vieux que cela. Il n’avait que quarante ans. Il ne se sentait pas disposé à mettre un terme à sa façon de vivre.

Après avoir tourné la page de son roman, il se pencha un peu en avant afin de saisir sa tasse de thé. Il en avala une gorgée tout en continuant sa lecture plus que passionnante. Plus rien ne semblait exister mis à part les aventures du personnage principale de cette histoire. Il était complètement absorbé. Tant et si bien qu’il ne remarqua pas la jeune femme devant lui qui le fixait, les bras croisés, tapant très légèrement du pied. Il ne releva les yeux que lorsque son très cher livre lui fut arraché des mains. Il releva alors un regard interrogateur sur la personne qui avait osé commettre un tel sacrilège.



- Lou rend moi ça…

- Cela fait dix minutes que j’essaye d’attirer ton attention ! Père !

- Hm ? Pardon. » répondit le Professeur en souriant doucement, reconnaissant son erreur. « Que voulais-tu ? »

- Où as-tu rangé les cultures que j’ai faites avant-hier ?

- A leur place.

- Justement, je ne les ai pas trouvées à leur place.

- Hm… Laisse-moi réfléchir deux minutes…



L’aîné se redressa et porta son regard vers le plafond. Qu’avait-il bien fait des cultures de bactéries de sa fille ? Il se souvenait les avoir déplacé pour ranger ses propres expériences… Mais où ? Une illumination lui parvint à ce moment. Il reporta son regard sur la jeune femme et s’apprêta à lui révéler leurs emplacement, lorsqu’un crissement de pneu suivit d’un bruit de freinage attira leur attention. Après un court instant de silence, le véhicule redémarra avec tout autant de vigueur. Dans le quartier calme où ils vivaient, ce genre de bruit était relativement inhabituel.

Curieux, le français s’approcha de la fenêtre afin de savoir qui se permettait un tel comportement et surtout pourquoi. Il vit alors un corps allongé en plein milieu de la voie. Son métier l’emportant sur le reste, il se précipita hors de la maison, sans laisser le temps à sa fille de voir à son tour ce qui se passait. Il se précipita près du blessé, espérant au fond de lui qu’il ne s’agisse pas d’un habitant de ce quartier. Il ne fut pas le seul à sortir de chez lui, plusieurs autres locataires du quartier s’approchèrent de la victime.



- Docteur Leblanc ! » fit une jeune femme tenant son enfant dans ses bras. « J’ai vu la voiture arriver et l’homme à l’intérieur sortir ce pauvre garçon de son coffre… Faites quelque chose… vite… »



Leblanc n’avait pas attendu la fin de la phrase pour se baisser sur le corps du blessé. Ce dernier allongé sur le ventre et visage contre terre, ne lui permettait pas au français de l’identifier. Pourtant celui-ci ressentit comme une étrange impression en voyant cette silhouette. Il lui semblait la connaître… Posant deux doigts au niveau de la jugulaire, il contrôla le pouls du garçon. Rapide… Trop rapide…



- Est- il en vie ? » demanda un vieil homme inquiet.



Le médecin releva les yeux puis répondit d’un signe de la tête. Il se tourna ensuite vers la maison afin d’appeler sa fille et de lui demander d’apporter une civière mais cette dernière l’avait devancé. Elle fixa à son tour le corps puis son père avant de poser l’objet au sol juste à côté du blessé. Elle se plaça ensuite au niveau des membres inférieur tendis que Leblanc se mettait à l’opposé. En même temps et sans un mot, ils tournèrent le corps, le faisant basculer sur le dos, sur la civière. Le professeur put alors voir le visage du jeune homme blessé. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’il reconnut Seishi… Que lui était-il arrivé ? Pourquoi était-il dans cet état ? Au vue des premières blessures, le médecin avait de suite compris qu’il avait été l’objet de tortures. Les hématomes sur son visage et son cou, laissaient penser aussi qu’il avait été battu. Les deux étaient liés de toute façon… Une nouvelle question s’imposait dans son esprit… Qui lui avait fait subir pareil traitement ? Il ne pensait pas Seigyo capable de ça. Il paraissait trop attaché à Seishi. Alors qui ? Et puis pourquoi son tuteur et mentor avait laissé faire cela ? Mais peut être était-il lui aussi en danger… Ou bien n’était-il pas au courant de ce fait. Quoi qu’il en soit, Leblanc ignorait ce qui avait pu arriver à Seishi. Tout était flou. Le seul moyen qu’il avait de pouvoir faire la lumière sur cette histoire, était d’appeler Seigyo.

Après avoir conduis Seishi dans la maison avec l’aide de sa fille, le professeur se dirigea vers le téléphone. Il décrocha le combiné puis se tourna vers Lou, l’air grave et inquiet.



- Occupe-toi de lui. » ordonna-t-il avec sérieux. « Fais lui une anesthésie et commence à le soigner. »



La jeune femme répondit d’un signe de la tête puis disparut dans la pièce où avait été placé le jeune garçon afin d’exécuter l’ordre de son père. Pendant ce temps, ce dernier composa le numéro de son jeune ami puis porta le combiné à son oreille. Deux tonalités retentirent avant qu’une personne ne décroche le téléphone.



- Takesada Seigyo, j’écoute ?

- Seigyo… C’est le Professeur Leblanc à l’appareil. Il faut que tu viennes immédiatement chez moi. C’est Seishi…

- Seishi ? J’arrive !



Le professeur n’eut pas le temps d’en dire plus qu’il se faisait raccrocher au nez. Il regarda une dernière fois le téléphone intrigué. Seigyo semblait inquiet pour Seishi. Il lui avait donné l’impression de l’avoir perdu. C’était une chose difficilement faisable mais pas impossible. Le garçon pouvait avoir fait une fugue. C’était de son âge. Il suffisait qu’il se soit disputé une nouvelle fois avec le tueur… Cependant, il ne pouvait l’affirmer. Il devait attendre la visite de son ami pour faire définitivement la lumière sur tout cela.

Soupirant longuement, il rejoignit sa fille auprès de Seishi et la trouva en train de recoudre plusieurs coupures que le jeune homme avait sur le torse et le ventre. Plusieurs bleus virant au noir s’étaient formés au niveau des côtes et un peu partout sur ses bras et ses jambes. Il était miraculeux qu’il n’ait pas eut d’hémorragies internes. Néanmoins, vu la couleur de l’un de ses flancs, Leblanc savait qu’il avait une ou plusieurs côtes de cassées. Il lui faudrait quand même faire une radio afin de voir si le poumon n’était pas atteint. En attendant, il devait aider Lou à le soigner. Il enfila une blouse puis mit un masque ainsi qu’une charlotte. Il se lava ensuite les mains avant d’enfiler des gants.

Aidant Lou à retourner lentement le corps maltraité, Leblanc stoppa son mouvement en voyant les plaies au niveau de l’omoplate droite du garçon. Il retraça lentement les lettres d’un mot avant de serrer les dents de colère. Il savait maintenant qui était à l’œuvre de ces mauvais traitements… Il laissa sa fille maintenant le corps sur le côté pendant qu’il nettoyait et soigner cette blessure. Ceci fait, ils remirent Seishi sur le dos avec grand soin, veillant à ne pas le manipuler de crainte que ses côtes ne perforent le poumon. Tout cela terminé, il se dirigea vers la sortie. Il se déshabilla puis lâcha un long soupir.

Lou le suivit et l’imita avant de le fixer avec calme. Elle avait bien vu le regard de son père lorsqu’il avait vu le dos du garçon. Elle avait bien entendu remarqué qu’il le connaissait. Maintenant, elle devait savoir qui il était et ce qui le tracassait autant.



- Père…

- Il s’appelle Seishi. » répondit le Professeur avec calme comme s’il avait deviné les pensées de sa fille. « Il est l’élève et le protégé de Seigyo. Tu n’étais pas là lorsqu’il me l’a amené la première fois. »

- Ce n’est pas Seigyo qui lui a fait ça. Ce n’est pas son genre.

- Non… Ce n’est pas lui.

- Tu sais qui ?

- Oui…



Lou n’était pas certaine de devoir lui demander qui était ce monstre qui avait osé lever la main de la sorte sur ce jeune garçon. Mais ce qu’elle pouvait remarquer dans son regard, était la colère. A cet instant précis, elle savait qu’il ne fallait pas que ce bourreau tombe entre ses mains. Le Professeur lui ferait certainement regretter son geste. La jeune femme l’avait rarement vu ainsi, aussi furieux. Son père était d’ordinaire quelqu’un de calme, de serein qui n’avait pas pour habitude de perdre son calme même devant une personne qui cherchait à le provoquer. Il partait du principe que s’énerver, faire monter la tension, n’attirait que plus les ennuis. La seule fois où il avait laissé sa colère exploser, était le jour de la mort de son meilleur ami, il y a plusieurs années. Lou en le regardant maintenant, savait qu’il était proche de la fureur.

Soupirant doucement, elle se dirigea vers la cuisine afin de lui faire un bon café puis revint avec la tasse fumante. Elle la lui tendit sans un mot. Leblanc la saisit et la porta à ses lèvres pour en boire une gorgée. Il remercia ensuite sa fille d’un signe de tête.



- Je ne sais pas si je dois te demander qui a fait ça…

- Tu peux…

- Alors ?

- Il s’agit d’un ami de Seigyo, un tueur qui travaille aussi pour l’organisation. Il a pour habitude de marquer ses victimes en gravant au couteau un mot au niveau de l’omoplate droite.

- Je sens que je vais regretter ma question… Quel est ce mot ?

- Prey.



Lou ouvrit les yeux quelque peu surprise. Elle avait un peu de peine à imaginer un tel mot graver sur l’arrière de l’épaule. La douleur éprouvée lors de la gravure, avait dû être terrible. Du moins, si le jeune homme était conscient à ce moment… Elle souhaitait que ce ne soit pas le cas. Cependant, son instinct lui disait que son bourreau avait ait son possible pour qu’il reste éveillé durant ce traitement. D’ailleurs… Combien de temps avait duré ces tortures ? Au vu de certains bleus devenus bien noir, il lui semblait que cela faisait plusieurs jours. Elle souhaitait du fond du cœur, se tromper.

Secouant la tête de gauche à droite pour ne pas y penser, elle fixa à nouveau son père, fronçant les sourcils. Elle prit appui contre le mur, les bras le long du corps, comme lassée.



- En d’autres termes, ce garçon est devenu une proie pour lui, comme l’ont été toutes les victimes avant lui. N’est-ce pas ?

- Sauf qu’il est en vie… » répondit Leblanc dans un soupir. « J’ai cette crainte qu’il tente de l’éliminer »

- Pourquoi ferait-il cela ? N’est-ce pas cet homme qui l’a abandonné devant notre porte ? Si c’est bien lui, c’est qu’il ne voulait pas le voir mourir.

- Hm… Nous ne savons pas si c’est bien lui qui l’a laissé là. Et ne me dit pas que la vitesse à laquelle il est parti, est une preuve. Ce n’est pas le cas. Cela pourrait être n’importe qui… Je préfère me méfier… Il n’est pas dans ses habitudes de laisser une proie en vie.



La jeune femme lâcha un soupir de dépit. Son père n’avait pas tord, elle ne pouvait affirmer si sa théorie était bonne ou non. Dans une situation comme celle-ci, il ne valait mieux pas faire des pronostics qui pourraient couter la vie de quelqu’un. De plus, elle n’était pas tueuse mais une scientifique. Elle ne connaissait rien à ce monde ou à leurs pratiques habituelles. Il était possible que cet homme ait pris Seishi comme cible et ait décidé de jouer un peu avec lui. Comment savoir ? Comment affirmer qu’il s’en prendrait encore à lui ou pas ? Son père avait raison, il valait mieux garder à l’esprit que ce tueur pouvait revenir à tout moment pour terminer son travail. Il leur fallait donc se montrer prudent et veiller sur le garçon. C’est pour cela que la jeune femme retourna dans la salle où avait été placé Seishi afin de le veiller.

Plusieurs dizaines de minutes s’écoulèrent avant que la sonnette de la porte d’entrée ne retentisse. Lou ne se bougea pas de sa place, laissant son père aller ouvrir à leur visiteur. Elle se doutait que ce dernier ne pouvait être que Seigyo. Elle entendit d’ailleurs les deux hommes parler puis se rapprocher d’elle. Finalement, la porte s’ouvrit et ils entrèrent. La jeune femme se redressa et s’approcha du tueur.



- Bonjour Seigyo.



Ce dernier ne répondit que d’un signe de la tête avant de porter son attention sur son partenaire, le regard rempli d’inquiétude. Il s’approcha de lui puis posa une main sur la chevelure châtain de Seishi avant de se tourner vers le Professeur et sa fille.



- Ne t’en fait pas… Il est hors de danger. » lui assura Leblanc avant que le brun n’ait pu poser la moindre question.

- Vous avez une idée de la personne qui lui a fait ça ?



L’aîné n’eut pas l’occasion de répondre à cette question que le regard de Seigyo se remplissait d’une fureur telle qu’il n’en avait jamais vu jusque là. Leblanc lâcha un soupir devant ce fait. Il n’avait pas l’intention de lui avouer l’identité du responsable de ce crime. Il aurait aimé attendre un peu… Juste le temps qu’il se calme…Hélas, il n’avait pas été difficile pour son vis-à-vis de trouver une réponse, il lui avait juste suffit d’entrer dans leurs esprits à sa fille et lui. Pourquoi aurait-il attendu une réponse qui se serait fait désiré ?

Etrangement, la colère dans les yeux du tueur s’estompèrent aussi brusquement qu’elle était entrée. Elle laissa la place à une sorte d’effarement. Il était difficile pour Seigyo d’imaginer l’un de ses amis torturant son protégé. Surtout, il ne comprenait pas les raisons de tout cela. Danny ne semblait pas haïr Seishi… Au contraire, il s’était montré amical et protecteur avec lui. Alors pourquoi ? Pourquoi lui faire subir tant de souffrance ? Il l’ignorait… Il n’arrivait pas à trouver de raisons valables.

Alors qu’il pensait à tout cela, un étrange sentiment de culpabilité monta en lui. Et si tout était sa faute ? Et si Danny lui en voulait personnellement ? Non… Ce ne pouvait être cela. Seigyo n’avait rien fait qui pouvait justifier une telle attitude. A moins qu’il ne se soit rendu compte de rien… Mais, il en doutait. Il y avait autre chose. Un détail important lui échappait.



- Seigyo ? » appela alors le professeur d’une voix calme, ne trahissant pas sa propre colère. « Est-ce que ça va ? »

- Etes vous certain que Danny est bien le responsable de son état ?

- Oui… Cela ne fait aucun doute possible. Il a apposé sa marque sur son omoplate droite. Il est évident qu’il voulait que nous sachions la vérité.

- Je ne comprends pas pourquoi il a fait ça…

- Moi non plus…



Le tueur ferma les yeux tout lâchant un nouveau soupir. Il n’arrivait pas toujours pas à imaginer Danny faisant subir un tel traitement à Seishi. Ce ne pouvait être lui… Quelqu’un voulait leur faire croire cela. Il n’était pas difficile d’imiter une marque pour détourner l’attention, pour accuser une tierce personne. Il était donc possible que la véritable cible soit son ami. Quelqu’un cherchait à le rendre coupable de ces actes.

Seigyo se demanda alors s’il n’allait pas chercher tout cela un peu loin. Il faisait tout pour trouver une excuse à Danny, pour le disculper. Et si… Il était réellement coupable ? S’il était bien celui qui avait torturé Seishi. Que ferait-il lui ? Sa colère l’emporterait-il au point d’en venir à tuer son ami ? Ou bien le laisserait-il partir, incapable de lever la main sur lui ? Il le saurait en lui faisant face.

Il se tourna donc vers la porte d’entrée et la fixa avec calme. En tant normal, n’importe qui aurait demandé à voir la victime mais lui désirait affronter en premier lieu son bourreau. Il voulait avant tout faire la lumière sur cette histoire. Peut être que tous se trompaient. Peut être Danny était-il innocent. De plus, il savait que Seishi devait être endormi. Rester auprès de lui ne servirait donc à rien.

C’est avec une certaine détermination qu’il se dirigea vers la sortie. Cependant, une main l’arrêta avant qu’il ne parvienne à l’atteindre. Seigyo se tourna vers Leblanc et l’observa en haussant un sourcil.



- Seigyo… Que vas-tu faire ?

- Je vais aller voir Danny pour lui demander des explications.

- Tu comptes le tuer si tu as la preuve que c’est bien lui le coupable de ces tortures ?

- Je ne sais pas. Je connais Danny depuis si longtemps que je me demande si je vais avoir le courage de lui faire payer ça.

- Ton but premier est de prouver qu’il n’y est pour rien. N’est-ce pas ?



Seigyo ne répondit pas. Il se détourna puis ouvrit la porte avant de quitter la maison. Il ne voyait pas l’utilité d’n dire plus sur ses intentions. Leblanc n’était pas stupide, il le connaissait même trop bien. Il devait avoir conscience qu’il tenterait de prouver l’innocence de Danny. N’importe qui à sa place agirait ainsi… Il lui était si difficile d’imaginer l’américain torturer ainsi un garçon de l’âge de Seishi. Surtout sans raison valable… comment admettre un tel fait ?



Seigyo mit près d’une heure et demie avant d’arriver chez son ami. Il avait prit son temps, réfléchissant à tout ce qui était survenu durant son absence. Il n’arrivait pas encore à comprendre ce qui avait pu pousser Danny à agir de la sorte, si c’était bien lui le coupable. Il espérait se tromper sur le compte de son ami.

Arrivé devant l’immeuble où Danny possédait son appartement, le tueur se glissa hors de son véhicule. Il s’engouffra dans le parking souterrain afin de s’assurer de la présence de l’américain. Il risquait de perdre du temps à monter et à trouver les lieux vide. La voiture sombre garée à la place réservée à son ami lui confirma que celui-ci était bien dans son appartement. Il se dirigea donc vers l’ascenseur. Mais une présence dans les ténèbres non loin sur sa droite le fit s’arrêter et se tourner. Il scruta l’obscurité, certain d’y avoir aperçu quelque chose. Aucun mouvement… Intrigué, le brun avança un peu en direction de ce coin d’ombre. Il plissa les yeux comme si cela allait l’aider à mieux discerner les formes. Instinctivement, il glissa sa main à l’intérieur de sa veste, caressant du bout des doigts la crosse de son arme. Il sentait comme une pointe de stress naitre en lui. Il n’aimait pas ce genre de situation, qui lui affirmait qu’il y avait quelque chose d’anormale, sans qu’il puisse vraiment dire quoi. Il savait qu’il y avait une personne cachée dans les ténèbres. Il se savait épié…

Retenant sa respiration, Seigyo fit un pas dans ce coin sans lumière puis s’arrêta brusquement. Il se redressa un peu avant de lâcher un long soupir.



- Eike ! Sors de là !



L’interpellé apparut hors des ombres, un grand sourire étirant ses lèvres. Il s’approcha presqu’en sautillant de son ami et s’arrêta à un pas de lui. Il le fixa sans se défaire de cet éternel sourire, qui malgré cet impression de joie, cachait beaucoup de non-dits.



- Je ne te demanderai pas comment tu as su que c’était moi ! Ce n’était pas difficile à deviner ! » déclara Eike en ricanant.

- Ne recommence jamais ce genre de chose. J’aurai pu te tirer dessus.

- Mais non ! Tu ne l’aurais pas fait avant d’avoir su qui te surveillait. Et puis c’était trop drôle de voir ta tête !

- Il n’y a que toi qui trouve ça amusant. » répliqua Seigyo avec un léger soupir de dépit. « Et si tu me disais ce que tu fais ici ? »

- Je continue le travail que tu m’as donné l’autre jour. J’en ai au moins retrouvé un ! Mais je ne sais pas où est le gamin.

- Chez Leblanc… En piteux état.



Eike le fixa tout en fronçant les sourcils, son sourire s’effaçant de son visage. Vu l’air grave de son ami, il en déduisit que son ami se faisait réellement du souci pour le gamin. Mais pas uniquement pour lui… Il devait s’inquiéter pour Danny. Vu que ce dernier avait pour mission de surveiller le dénommé Seishi durant l’absence du tueur, il s’attendait certainement à trouver l’américain en tout aussi mauvais état. Au moins, il allait pouvoir le rassurer sur ce point même si un détail qu’il n’arrivait à trouver, lui affirmait que le problème de Seigyo allait bien au-delà de son inquiétude pour Danny.



- Tu sais… Danny va bien. Je l’ai vu descendre de sa voiture, il y a de ça quelques minutes. Il était en parfaite santé. Aucune blessure en vue.



Seigyo ne put retenir un sursaut à ces paroles. Il porta son regard sur son vis-à-vis tout en serrant les poings. Eike put noter la présence de colère dans le regard du brun. Il comprit alors qu’en voulant le rassurer, il n’avait fait qu’augmenter l’angoisse qui semblait l’animer depuis quelques instants. Il n’avait jamais vu son ami ainsi. C’était la première fois qu’il le voyait habité de sentiments contradictoires.



- Seigyo… Que s’est-il passé réellement ? Pourquoi est-ce que j’ai l’impression de voir de la rage en toi mais aussi de la peur ? Qu’est-ce qui ne va pas ?

- C’est Danny qui a torturé Seishi… Durant toute mon absence.

- Tu es certain de ce que tu affirmes ? Tu as une preuve de cela ?

- Il a gravé sa marque sur son corps.

- Pourquoi ? Pourquoi s’en est-il pris au gamin ?

- Je l’ignore… Et c’est en parti ce qui m’inquiète. Ca et le fait de ne pas être capable de le lui faire payer. Il est mon ami depuis si longtemps. Je ne comprends pas ce qui lui a pris…



Seigyo se passa une main nerveuse dans les cheveux. Eike l’observa attentivement, surpris de le voir ainsi réagir. D’après ce qu’il lui avait dit, ses relations avec Seishi se passaient plutôt mal. Pourtant, son inquiétude, cette crainte de ne pouvoir le venger, tout dans son comportement donnait l’impression de voir un grand frère cherchant à protéger son cadet. Il devait s’être attaché à lui malgré leurs différents. Cela n’était pas tellement surprenant au final. Seigyo n’était pas mauvais au fond de lui. Il prenait facilement les chiots perdus sous aile. Il était d’ailleurs surprenant qu’un homme comme lui soit devenu tueur. Il n’en avait pas le profil…

Tous les deux plongés sans leurs pensées, ne remarquèrent pas immédiatement Danny s’approchant d’eux. Ce ne fut qu’un raclement de gorge qui attira leur attention. Seigyo pivota sur lui-même pour faire face à son ami. Ce dernier arborait un sourire légèrement amusé. Il s’avança encore un peu puis s’immobilisa à une distance de sécurité des deux tueurs.



- Seigyo, je savais que tu viendrais. Quant à toi Eike, c’est une surprise. J’ignorais que tu étais au Japon.



L’interpellé haussa les épaules comme si cette remarque lui était égale. Il n’avait jamais vraiment eu d’affinités avec Danny. Donc pourquoi l’aurait-il prévenu de sa venu au Japon ? De plus, il ne savait pas pourquoi, quelque chose le dérangeait chez lui. Il n’aimait pas vraiment ses méthodes dans le travail, c’était déjà un premier point. Il y en avait un autre qu’il n’arrivait à trouver. Et étrangement, ses méfiances vis-à-vis de cet homme, semblaient fondés. Vu le sourire qu’il affichait, ce regard amusé, cet air nonchalant, son comportement général démontrait bien qu’il n’était pas quelqu’un digne de confiance. Seigyo s’était fait piégé, trahir… Eike ne doutait pas un seul instant de l’implication de Danny dans les tortures subies par Seishi.



- Danny…

- Je t’interromps de suite avant que tu ne me poses cette question qui te brule les lèvres. Je suis bien celui qui a infligé toutes ces tortures à Seishi. Autant être franc avec toi sur ce point. Tu ne crois pas ?



Seigyo serra les poings, emprunts à une colère grandissante. Son empathie trahissait son état. En tant normal, il se serait certainement maitrisé afin que personne ne sache ce qu’il ressentait. Cependant, en l’état actuel des choses, il en était incapable. Ce qui trahissait un autre détail qu’il n’aurait peut-être pas eu envie de révéler… Son attachement pour Seishi. Il était devenu une sorte de faiblesse pour le tueur. Quelqu’un qui pouvait être utilisé contre lui afin de l’affaiblir. C’était aussi cela qui inquiétait Eike. Il n’aimait pas cette idée que son ami ait un point faible de ce type. Lui qui s’était tant évertué à ne pas en avoir par la passé. Ce gamin devait être particulier pour qu’il s’attache ainsi à lui.



- Pourquoi ? » demanda alors Seigyo le regard assombri. « Pourquoi lui as-tu fais ça ?

- Pourquoi… ? Hm… Je ne sais pas si je peux te l’avouer.

- PARLE !



Un fin sourire étira les lèvres de Danny alors que la rage de Seigyo ne faisait que grandir. Il semblait s’amuser de la situation. Il jouait à un jeu dangereux, il en avait conscience. Mais cela ne paraissait pas le déranger. Il aimait fleureter avec la mort. Il aimait d’autant plus torturer les gens, plus particulièrement leur esprit jusqu’à les pousser à bout. C’était une espèce de besoin vital. Il ne pouvait s’empêcher de les blesser physiquement comme psychologiquement. Le fait de laisser une marque sur ses victimes, était déjà une preuve en soit de ce fait. Une preuve que l’américain était atteint d’une folie qui ne se révélait que dans certaines circonstances.



- PARLE ! » insistant Seigyo perdant patience.

- Soit… Soit… Puisque tu veux le savoir. Même si cela ne t’avancera pas à grand-chose. Je n’ai fait que remplir un contrat.

- Un contrat ? Sur Seishi ? Mais qui t’a demandé ça ? Et pourquoi ?

- Qui ? Je ne peux pas te répondre. C’est le secret professionnel. Quant aux motifs… C’est juste pour lui rappeler certaines petites choses.

- Je ne comprends pas…

- Il n’y a rien à comprendre. Seul Seishi et le commanditaire peuvent fournir une explication sur tout cela et bien entendu interpréter ces actions commandées. Nous sommes à cents lieux de pouvoir saisir le sens de tout ça. D’ailleurs… Si je suis encore ici c’est pour transmettre un dernier message au gamin. Comme tu es ici, tu serviras d’intermédiaire.



Danny sortit une enveloppe de la poche intérieure de son manteau. Il la posa sur le sol sans quitter son vis-à-vis des yeux. Il fit ensuite un pas en arrière. A ce moment, Seigyo battit l’air d’un mouvement de main, cherchant à utiliser son don sur l’américain. Hélas rien ne se produisit. Il regarda alors sa main puis Danny avant de serrer les dents de rage, comprenant ce qui venait de se produire.



- Tu ne croyais pas que j’allais te laisser me piéger aussi bêtement. J’ai bloqué ton don ainsi que celui d’Eike. Maintenant, je vais vous laisser. Je dois rentrer aux Etats-Unis. Beaucoup de travail m’attend là-bas. Je compte sur toi pour passer ce message au petit. Je te dis Adieu mon ami.



Sans un mot de plus et sans que Seigyo ou Eike ne puissent l’arrêter, Danny s’éloigna. Il monta dans sa voiture puis démarra et quitta les lieux. Ce fut seulement après son départ de la zone que les deux hommes retrouvèrent leurs dons. Seigyo serra les poings de rage tout en se laissant tomber sur les genoux. Il donna un puissant coup sur le sol, laissant entendre un petit craquement. A ce bruit, Eike s’approcha et se pencha pour lui prendre la main. Le sang qui s’écoulait et la couleur bleuté qui revêtait la paume témoignait d’une petite fracture. Son ami avait vraiment dû frapper avec force. Toute sa rage avait besoin de s’évacuer… C’était compréhensible. Il s’était retrouvé impuissant devant Danny, tout comme lui. Eike comprenait son ressenti… Il éprouvait tout autant cette envie de tuer cet homme qui s’était joué d’eux. Cependant, le temps n’était plus à cela. Danny s’était enfui, Seishi était grièvement blessé, Seigyo devait donc penser avant tout à son protégé. Après ce qu’il avait subi, il ne faisait aucun doute qu’il allait avoir besoin de soutien.



- Seigyo… Je te ramène chez Leblanc… Il faut soigner ta main. Et puis… Il y a Seishi. Tu vas devoir l’aider.



L’interpellé resta un instant, les yeux fermés, les poings toujours serrés de rage. Puis finalement, il se redressa et fixa l’enveloppe toujours au sol, avec une certaine froideur. Il s’en approcha pour la saisir et fut tenté de l’ouvrir. Cependant, il n’en fit rien. Il la regarda sous toutes les coutures. Le désir de la bruler afin que Seishi ne puisse jamais savoir les raisons des mauvais traitements, lui traversa l’esprit. Mais une fois de plus, il ne passa pas à l’action. Ne rien savoir était parfois plus difficile que de connaître la vérité. Il se devait donc de lui donner cette lettre…

Sans un mot, il se dirigea vers la sortie du parking afin de regagner sa voiture. Il s’y engouffra et ne fut guère surpris de voir Eike venir s’installer à ses côtés. Il l’observa un instant puis mit le contact et prit la direction de la maison du Professeur Leblanc, le cœur et l’esprit envahies par une profonde culpabilité.
 


A suivre …